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Bicycle Road Rage

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Lun 14 Déc - 9:46

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Timber & Cross
Du 04 au 25.02
2020
Bicycle Road Rage

Partie Monster Trucks

Le temps que Chenoa se prépare, le jeune homme avait quitté la chambre. Il passait un coup de fil depuis le téléphone du comptoir, l’ayant emprunté à la vieille mégère. Sur le dernier point de chute, une petite ville, il cherchait à savoir si Bradford avait bien reçu son message. Etant donné qu’il n’avait visiblement aucune ligne et qu’il restait bien à l’écart de la civilisation, Greer avait tenté de faire transiter un pli pour l’avertir de son arrivée. Mais il fallait croire que le messager avait bouffé la commission ou qu’il s’était fait écorché vif par les indiens du coin : il était sans nouvelles.

Passablement agacé sur le moment, il croisa son exutoire et lui offrit un sourire moqueur. Rien de mieux qu’emmerder Timber sur le temps passé dans la salle de bain, la rengaine sexiste habituelle sur les femmes, pour se remettre en forme. Retourner si vite sur la selle de sa moto le fît souffrir et il ne put le dissimuler cette fois. C’était une passion agréable mais ça commençait vraiment à lui tirer dessus. Trop en peu de temps…
Scott serra les dents et guida Chenoa tranquillement sans faire le fou. Il voyagea à vitesse normale, prenant son temps, et se réajustant sans arrêt sur sa selle.
Une fois rendu au bon endroit, le copilote gara son engin à côté des autres motos puis gagna le flux de la foule qui se compressait devant les agents de sécurité comme du bétail. C’était noir de monde. Toute la ville était en train de converger sur ces énormes gradins, très étendus, qui cernaient une arène de terre battue.

Une bonne odeur de saucisses et de merguez cuites au feu de bois capta son attention. Ils venaient tout juste de franchir la sécurité, les billets vérifiés, et ils allaient passer dans les gradins lorsqu’il fit brusquement volte-face. Scott agrippa sans ménagement l’avant bras de Chenoa pour qu’elle ne se fasse pas embarquer par le mouvement de foule et l’attira à sa suite jusqu’à la caravane déjà assiégée du vendeur. Greer joua des coudes et des épaules, prenant même parfois les airs du type dangereux qui ne fallait pas faire chier, et trouva une bonne position pour passer commande.

Après tout ce voyage, il savait que son amie crevait la dalle. Quant à lui, il ajoutait en plus le fait que la bonne vieille barquette frites de la Terre ne lui avait jamais autant manqué. Il se fit un bon stock de munition en se prenant un pack de bières et quelques barquettes de frites saucisses. Pour ce soir, il laissait de côté le pitre. Donc la commande de Chenoa s’ajouta à la sienne puis il régla le tout. Timber s’était chargée de la chambre. Lui ce serait la soirée Monster Truck. Forcément, la pilote dû l’aider à transporter toute la bouffe en se lançant en quête d’une bonne place.
Étonnamment, et parce qu’ils étaient arrivés assez tôt, ça ne fût pas si compliqué. L’attente aurait dû être interminable. Mais finalement, en comprenant que Timber n’avait jamais participé à ce genre d’attraction, il grignota tranquillement son repas tout en lui faisant un cours sur le principe du Monster Truck. Les obstacles bien corsés qu’ils allaient devoir franchir, le duel entre deux véhicules pour savoir lequel serait le plus solide.

Il évita soigneusement les détails les plus croustillants pour lui laisser le loisir de les découvrir. La vie était vraiment bizarre par moment...il se faisait une soirée Monster Trucks avec sa collègue de boulot, comme une bonne pote, qui s’avérait être celle qu’il avait blessé par le passé. Et c’était sans compter ce qu’elle représentait par sa nature même.
Pourtant, il déconnait avec elle, elle était plutôt réceptive. Pas d’embrouilles pour l’instant, elle l’avait suivi même avoir appris qui avait conçu cette fameuse photographie. A un moment où son regard s’était perdu dans le vague, il prit une gorgée de bière en se demandant jusqu’où allait l’emmener sa quête de rédemption.

« C’est quand même dingue que t’es jamais allée voir des trucs comme ça. » Nota Scott en entamant tranquillement sa deuxième barquette. « Qu’est-ce que tu foutais de tout ton temps libre à part bosser et fumer de l’herbe ? »

« J’apprenais à me chervir des obchets qui avaient sous le canap’ hé. », rétorqua-t-elle la bouche pleine en haussant des épaules, non sans rigoler ensuite grassement une fois qu’elle eut déglutie son morceau de merguez et de pain.
« Et après tu t’plains de ton surnom d’étudiante ?!? » lui balança-t-il tout aussi gratuitement. Il croisa son regard, avec un reste de moutarde sur le coin de la goule, et la provoca clairement du regard.
« T’as cherché ! »
« Tu marques un point. », observa-t-elle en haussant des épaules. Elle reporta son regard sur la scène, guettant du coin de l’oeil qu’il fasse de même, et d’ajouter : « Hey Scott tu sais quoi ?»
« Quoi ? Tu m’as trouvé une meuf encore plus moche que la dernière ?!? »
« Nan. T’as de la moutarde sur la gueule. ». Et elle lui écrasa un morceau de pain avec de la moutarde sur le pif. Et d’ajouter en éclatant de rire : « T’as cherché ! »
Sur le moment, Greer se recula, le visage rougi de colère alors que le morceau de pain était resté collé sur sa tronche. Mais il se marra finalement avec elle et secoua la tête.
« Tant que c’est de la moutarde, moi ça me rassure. Putain...là...t’imagines même pas la guerre qui t’attends ! Tu vas me le payer. »
Il retira les souillures avec la minuscule serviette déjà tachée du gras des frites. Mais avant d’en retirer le plus gros, il sauta brutalement sur Timber et écrasa sa joue contre la sienne.
« T’as de la moutarde sur la gueule !!! »
Elle le sentait arriver, mais il ne se contenta pas de répliquer avec son sandwich, il lui sauta carrément dessus. C’était petit joueur, et elle faillit renverser toute la nourriture qu’elle avait ramené.
Pour le coup, elle avait décidé de faire la grosse et de manger gras, aussi quand Scott avait commencé à commander comme un sac, elle avait suivi le mouvement, et ils n’étaient pas trop de leur quatre mains pour embarquer toute cette nourriture jusqu’à leur place.
« T’es un connard Cross ! », gueula-t-elle en s’écartant, faussement en colère surtout qu’elle se marrait à moitié. Forcément, elle avait bousculé le mec à sa droite. Elle s’excusa d’un désolé innocent en accusant le copilote de ne pas savoir se tenir, avant de reporter son attention sur la “scène” et sur les gradins, laissant ses yeux flotter distraitement.
« Mais bien sûr que je suis un connard. Le jour où je serais un mec cool, je t’autorise à me buter ! »
« Pffff tête de cul. », répliqua-t-elle, avant de reprendre : « Et pour répondre à ta question, j’avais pas vraiment le fric pour aller à ce genre de truc, et franchement, je préférai largement aller à un meeting aérien plutôt que de voir des gros bonhommes s’amuser avec des grosses voitures à gros pneus pour compenser leur petite bite. ». Elle afficha un sourire entendu à Cross, alors qu’elle avait reprit son calme et qu’elle s’essuyait la joue.

La définition du Monster Truck par Penikett, c’était pas mal, et elle allait certainement vexer quelques puristes. D’ailleurs, elle s’attira quelques regards en coin, pas franchement amicaux, mais personne n’osa lui faire de réflexion ou n’osa la prendre à partie. Elle ne remarqua rien de toute façon, et elle mordit de nouveau avec appétit dans son sandwich pain beurre merguez, la base.
Cross éclata de rire. Il adorait son franc parlé et cette acidité. C’est bien pour ça qu’il passait son temps à l’emmerder. Même quand il était la cible de sa colère, c’était du régal. Il répondit :
« T’as l’air d’en savoir long sur eux...d’ailleurs, y’en a deux trois qui t’verrais bien empalée dans leurs grosses “voitures”. Guette à droite ! »
Forcément, Chenoa se méfia. Elle avait quand même pris l’initiative de lui éclater un sandwich dans la tronche. « Bien sûr, si je regarde à droite tu vas m’entarter ! », se défendit-elle.
« Avec quoi ? Je vais pas gâcher ma propre bouffe sur une gueule d’emplumée !! »
« M’ouais. J’ai pris ma douche moi, alors ... », menaça-t-elle en tournant légèrement le regard, le bras près à se détendre pour contrer une attaque en fourbe tandis qu’elle jetait un coup d’oeil à droite.
Forcément, Scott feinta le geste pour lui faire peur mais rien ne vola vers sa figure. Effectivement, quelques regards tombaient régulièrement sur la jeune femme.

La partie de Monster Trucks fût tout de même assez impressionnante par moment, surtout lorsque l’annonceur déclara que la fin de la soirée se terminerait sur un tournoi de casse. Le but ? Une quinzaine de bagnoles bidouillées spécialement pour cette occasion s’alignaient en cercle dans l'arène. Et au signal, tout ce beau monde jouait à l’auto-tamponneuse version grand luxe. Des tapés du ciboulots qui se fonçaient dessus, jusqu’à ne plus avoir le moindre morceaux de taule et terminer en panne, la gueule à l’envers. Il y eût des accidents spectaculaire ponctué par les cris du public. Scott ne s’était pas retenu, il sifflait fort dès qu’il le pouvait et commentait certaines des actions.
Chenoa n’était pas en reste. Elle avait clairement pris parti pour un concurrent et elle gueulait au moins aussi fort que les spectateurs autour d’eux, histoire de l’encourager ou d’insulter celui qui s’en prenait à lui. Forcément, elle avait parié sur le mauvais cheval et ce dernier termina sur le flanc, échoué comme une merde sur un autre concurrent. Un terrain idéal pour que Scott l’emmerde davantage en lui disant qu’elle avait du nez pour flairer les perdants.

A la fin, il ressortit calmement dans la marée humaine le coeur léger. Il était heureux d’avoir pu se détendre dans un événement de ce genre, qui ne verrait jamais le jour sur Pégase. Assoiffé, il fit un détour vers le stand qui s’occupait de la seconde vague et commanda une bière. Il y ajouta une barbapapa qu’il tendit à son amie.
« Vu que t’es une emplumée ignarde, faut tu saches que la meuf se barre pas sans ça ! »
« Ah ouais ? Tant mieux parce que j’aime bien ça. », répliqua-t-elle en tendant le bras pour s’en saisir, tout en faisant gaffe de ne pas la prendre dans le nez, ce qui serait un désastre pour ses cheveux tout ce sucre collé.
Scott était dans un autre état d’esprit, surement le moment de flottement qui suivait ce loisir et le spectacle qui lui en avait mis plein les yeux. Il s’installa sur sa moto le temps qu’il siffle sa bière, discutant et commentant le dernier match avec Timber. Il se disait que ce serait pas mal de trouver un moyen de faire des trucs dans le genre avec l’escadrille, voyant parfaitement Apollo s’encastrer violemment dans Pied-de-Biche sans faire un pli. Ou un crépage de chignon “motorisé” en règle entre Blue et Vénus.
Une fois la barbapapa enterrée et la bière terminée, le copilote attendit le signal pour faire le retour vers un sommeil bien mérité.


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Sam 19 Déc - 14:38

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Timber & Cross
Du 04 au 25.02
2020
Bicycle Road Rage

Le retour se fit calmement.
Scott retourna avec son amie jusqu’au motel et ignora les clins d’oeil de la mégère pleins de sous-entendu. Quand il entra dans la chambre, il s’empressa d’aller en premier aux toilettes comme un royal connard, sachant pertinemment que les femmes avaient tendance à avoir sacrément envie au retour de ce genre de soirée. Il s’offrit même le luxe d’ouvrir les robinets du lavabo à fond pour qu’elle entende bien l’eau couler, et la torturer, plutôt que de dissimuler les gazs d’une digestion en pleine action. Encore un autre cadeau bien bas.

Il était tard. Et malgré le bon moment passé à mater des bagnoles s’encastrer, Scott sentait qu’il avait les yeux piquants. Ca allait être rude le lendemain vu qu’ils devaient partir encore plus tôt. Ce fût à son tour d’aller prendre une douche. Il en ressortit brusquement dans son froc, les cheveux encore humide, la serviette sur les épaules. Il râlait dans sa barbe tout en faisant de grandes enjambées.
« J’suis trop con. J’ai oublié le pyj dans la moto, putain ! » S’énerva-t-il en quittant la chambre en coup de vent. Quand il revint, il trouva le moyen de perdre la serviette en chemin. Son dos dévoila à la lumière de la pièce quatre cercles cicatriciels dont la couleur jurait fatalement sur son teint habituel. Des cicatrices qui gueulaient un énorme “plaie par balle”. Que ce soit par pudeur mais aussi parce qu’il savait que ça allait sauter aux yeux de quelqu’un d’aussi curieux que l’indienne, Scott se pencha pour récupérer sa serviette et se sauva dans la salle de bain sans dire un mot de plus.

Il en ressortit un peu plus tard, comme si de rien n’était.
Son regard se posa sur le lit complètement vide, ce qui l’étonna. Il bifurqua pour découvrir l’emplumée allongée sur le fameux canapé. Ca lui fit ouvrir de grands yeux et il éclata de rire.
« C’est un appel au crime là ! »

Chenoa était fatiguée, du trajet et de la soirée. Pourtant, elle restait de bonne composition et encore encline à ne pas se laisser emmerder gratuitement. Néanmoins, maintenant qu’elle était allongée dans le canap, elle comptait bien se laisser aller vers un sommeil réparateur, et elle sentait les prémices des caresses de Morphée. Enfin…. De Coyote déguisé en Morphée, cela allait de soi.
« J’dispute pas la place la plus confortable à Don Corleone. », répliqua-t-elle en s’ajustant pour faire rentrer ses grandes jambes dans la longueur, la tête bien calée sur un oreiller. Petite référence à ce qu’elle avait vu dans son dos.
Elle le prenait pour un mafiosi ?
C’était un compliment non ?

Scott était bien tenté de déconné sur le sujet. Mais à vrai dire, il était tout aussi crevé et il n’avait pas du tout l’intention de prendre des gants. Le copilote fixa son amie à moitié “empaquetée” dans son canapé couvert de fluides moisis et secoua la tête.

« Tu comptes vraiment dormir sur ce truc dégueulasse qui fait un tiers de ta taille ? » Elle opina du chef pour confirmer que “oui”.
Scott haussa des épaules en se dirigeant vers le lit.
« Quand t’en auras marre de te péter le dos avec la route qui t’attends demain, y’a une place de libre dans le pieu. Je te rassure, ton cul risque rien. » S’exclama-t-il en s’installant. « Juste tes grandes cannes si tu me fais chier avec, je te les casse. A toi de voir si tu prends le risque... »
Et il s’allongea en soupirant d’aise. Du sommeil, enfin…
« On va galérer demain... »
« Ouaip, pour ça que j’prends pas le risque, je préfère avoir mes deux jambes pour rouler demain. », répondit-elle en fixant le plafond.
« T’as pas éteint la lumière. », rajouta-t-elle, ayant remarqué que l'interrupteur n’était pas près du lit.
« Putain !!! » S’écria-t-il, la mort dans l’âme.

Lendemain matin.
Se lever fût beaucoup plus dur que prévu. Sans la routine de la vie d’escadrille, les signaux sonore de prise de service, il était bien difficile de s’arracher du lit quand on entendait rien gueuler. Scott se redressa avec une sale gueule. Il jeta les couvertures nonchalamment sur le côté. Assis là, sur le bord, il se frotta le visage tout en grognant.
La route n’allait pas être facile cette fois. Il avait le cul en marmelade et il savait que les centaines de kilomètres qui le séparait de Bradford n’allaient pas se laisser couler tout seul. Cette fois ci ce ne serait pas que du pur loisir. Ce serait également un challenge. Au fond de ses tripes, logé au cours de la nuit, cette petite anxiété dévorante. Celle que l’on redoute et ressent à l’approche de l’échéance.
Scott déglutit et se massa le visage. Ce soir, son amie découvrirait toute la vérité. Il en étant encore à se demander si ce n’était pas une erreur. S’il n’était tout simplement pas en train de se foutre un putain de 45 sur la tempe.
Non, il y avait déjà suffisamment réfléchi durant le voyage du Dédale. Cette gonzesse aussi vicelarde qu’une journaliste et capable de s’accrocher comme une tique finirait par découvrir le pot aux roses. Il ne fallait pas que ça se fasse sur le croiseur. Surtout pas.

«Hé ! Faut s’lever, on est déjà en retard !» Lâcha Scott en balançant un truc en direction de la forme assoupie dans le canapé.
« Ferme la... », répondit la chose assoupie dans le canapé, d’une voix lasse et ensommeillée. Loin de se lever, elle se tourna de trois quart pour offrir son dos histoire de montrer qu’elle voulait la paix.
«Lève toi. Pour ton bien Timber !» grommela Scott.
« Ok papa…. quand les pancakes seront cuits... », grommela-t-elle en se frottant les yeux. Elle avait passé une excellente nuit, quoiqu’un peu trop courte. Finalement, elle bascula pour se redresser, croisant les jambes pour les mettres en tailleur. Ses cheveux formaient un agglomérat de noeuds par endroit. La gueule enfarinée, elle se frotta une nouvelle fois les yeux. « Pouah, on dirait que je sors d’un entraînement de Specter, j’suis fracasse. ». Elle faisait référence à un sergent instructeur qui mettait un point d’honneur à voir les pilotes de l’escadrille en “pleine forme physique” en les gratifiant de petites séances sportives, qui n’avaient de petite que le nom.
«Moi j’suis en pleine forme. C’est toi qui suit pas.» Mentit Scott.
« M’ouais. », répondit-elle sans chercher le débat plus loin alors qu’elle s’étirait, sentant que sa carcasse avait besoin de s’étendre un peu, surtout après une nuit dans un canapé et une journée de moto complète.

Il poussa un grognement. Il partit en premier en direction de la salle de bain en marchant comme un canard. Il évita soigneusement de se regarder dans le miroir en passant et s’installa dans la cabine de douche. Rien de mieux qu’une foutue douche gelée pour essayer de se réveiller. Le contact brutal et mordant du froid le fit gueuler. Mais comme s’il avait été une question de virilité mal placée, il refusa de tourner le robinet d’eau chaude. C’est ce qui le fît émerger de son impression d'anesthésie.
Quand ce fût au tour de Timber, il lui piqua ses clés dans son cuir pour aller contrôler les motos et les préparer au voyage. Il trouva la mégère en chemin et lui acheta de quoi partir. Des Sandwichs dans le cas où ils auraient un creux avant de croiser un resto. Quelques bouteilles d’eau pour remplacer celles que Timber avait vidé, des barres de céréales. Bref, il fît le même genre de préparation que la dernière fois. Il savait que le soleil allait taper fort aujourd’hui alors il s’était préparé. Il s’offrit même le luxe de se couvrir d’un bandana et d’une casquette au nom d’une équipe de football obscure.

Une fois qu’il eut vérifié que les niveaux étaient bons, il se pencha sur l’étude de sa carte. Il se désigna plusieurs checkpoint d’arrêts et d’essences, découvrant qu’ils faisaient face à une épreuve plus corsée qu’il ne l’imaginait. La première journée avait été sympa mais épuisante. Maintenant ça devenait un putain de sport physique...de la haute voltige, il allait falloir tenir le bitume jusqu’à la fin de la journée.
Un sourire narquois le gagna à l’idée de tester Timber sur l’endurance. Il se demandait si c’est elle ou lui qui allait demander le premier arrêt.

Cette dernière arriva avec dans les bras les mêmes sandwichs que Scott avait pris auprès de la tenancière du motel. La douche lui avait fait du bien, et elle avait repris ses esprits, prête à avaler du bitume sur la journée, même si elle sentait qu’elle en aurait vite marre. Néanmoins, la perspective de faire ronronner cette belle moto lui laissait toujours un sentiment d’avidité.
« Et tu sais quoi ?! », fit-elle en exhibant les sandwichs à Scott.
«Elle te les a offert gratos après lui avoir raconté pleins de trucs cochons sur ton petit chien ?!?» déconna Scott.
« Pas gratos mais dans le mille. J’ai eu une bonne réduc ! ». Elle lui fit un sourire entendu avant de lui en balancer un.
«Au moins...» débuta Scott en réceptionnant maladroitement le sandwich. «C’est rassurant, tu pourras toujours enrhumer de la vicelarde si tu te fais éjecter du Dédale. T’es une camelote, Timber.»
« Je suis pleine de ressources. », confirma-t-elle en s’installant sur sa meule. Elle observa l’engin depuis sa selle, avant de se tourner vers Scott une nouvelle fois : « Alors, tout baigne chef ? »
«Tout baigne.» Répondit-il en se demandant si elle parlait de la moto ou de la putain d’angoisse qu’il se savait avoir dans le regard.
«Ca fait un paquet d’années qu’on s’est pas revu. J’me demande encore comment t’as pu me foutre cette idée dans la tête...»
« J’t’ai simplement dit d’aller de le voir si tu voulais je crois, je t’ai pas forcé. Mais c’est bien de reconnaître que j’ai de l’influence sur toi. », ajouta-t-elle avec un sourire entendu et un haussement de sourcil pédant.
«Calme ta joie, Timber. Moi aussi j’ai de l’influence. Et bientôt tu trouveras naturel de me tenir compagnie en taule.»
« QUOI ???!!! », fit-elle en enfilant son casque. Et d’ajouter : « J’suis désolée, j’ENTENDS RIEN ! »
«J’ai….J’AI DIS….»
Scott serra les dents en la regardant allier les signes à la voix.
«S’pèce de garce emplumée !»
On pouvait facilement deviner son sourire dans son casque. Elle démarra sa moto et elle fit ronfler le moteur avec vigueur, montrant par là qu’elle était prête à canarder sur la route et à laisser Sioux City derrière elle.

Le temps fila, les kilomètres aussi.
Au début, Scott parvint à tenir bon. Mais sa moto n’était pas faite pour les longues distances, c’était un véritable tape-cul qui le torturait plus que Timber. La nuit passée ne l’avait aidé qu’à réveiller un peu plus la douleur et l’inflammation. Il était maché et les moindres chaos sur la route se rappelaient à son bon souvenir dans son arrière train. A croire que Tesh Lays était de nouveau en train de faire de la spéléo dans son fondement. Rien que cette idée lui arracha un cri de rage et il donna encore plus de lui-même.
Hélas, tout le monde connait ses limites.

Greer multiplia peu à peu les arrêts imprévus, essayant de dissimuler ça dans une forme d’attention pour la fatigue de sa collègue. Mais elle n’était pas débile, elle comprendrait rapidement qu’il était rincé et qu’il avait besoin de se sortir le cul de la selle quelques minutes à chaque centaine de bornes.
D’ailleurs, Timber était bien tentée de le taquiner avec ça, mais elle préférait s’abstenir. Malgré une moto qu’on pouvait qualifier de routière, ou presque, elle en avait marre et elle sentait que c’était de plus en plus difficile. Cela dit, elle tenait le choc, le postérieur nettement moins endolori que son comparse à cause de la selle confort montée sur ressort de sa bécane, qui n’avait rien à voir avec la planche de bois qui servait de repose miche à Cross. Les arrêts étaient donc bienvenues, surtout pour étirer ses cannes, et faire craquer quelques articulations. Néanmoins, le voyage semblait interminable.

Lorsqu’ils arrivèrent après un périple interminable dans le dernier petit village, le soleil avait sérieusement décliné. Scott se trouvait ragaillardi et motivé par ce panneau qui signalait enfin la dernière ligne droite. Il fît un arrêt au bureau du Shérif pour lui expliquer sa situation et tenter de joindre Bradford. Mais celui-ci, s’il était bien connu, n’avait aucune ligne fixe. Il habitait un chalet à l’écart du village, intégré à la réserve indienne locale.

Bredouille sans vraiment l’être, Scott ressortit en annonçant la bonne nouvelle à Chenoa. Ils avaient tellement galéré que sa réserve de blagues pourries était à sec, à l’instar de la réserve de répartie de la jeune femme. Ils roulèrent encore une bonne demi-heure sur des chemins de terre et des sentiers perdus que les deux motos encaissaient très désagréablement. Chenoa n’aimait pas spécialement ça, surtout avec une Harley, et elle serrait les fesses dès qu’il fallait mettre un peu d’angle, de peur que sa roue avant ne se barre et qu’elle prenne une gamelle. Mais tout compte fait, la partie cycle de la bécane faisait des merveilles. Puis, finalement, les maisons, les caravanes et casemates de la réserve apparurent au creux d’une vallée cernée d’arbres, ce qui fit monter la curiosité de l’amérindienne crescendo. C’était la première fois qu’elle se rendait dans une autre réserve que la sienne. Leur arrivée n’était pas passée inaperçue. Des bruits et les regards curieux, parfois hostiles. Une bande d’indiens traditionnels sur des chevaux, d’autres en pick-up, habillés convenablement. Quelques uns les suivaient à distance. Ils utilisaient les hauteurs pour les observer.

Greer fût tenté de leur adresser un beau doigt d’honneur pour la forme mais il se contenait. L’épuisement le rendait plus arrogant et agressif. Chenoa en avait fait malheureusement les frais quelques fois au point qu’il avait noté qu’il devrait se racheter d’une façon déguisée. Mais voilà… ils n’étaient plus très loin. En compagnie de son amie, les deux motos ronflantes de surchauffe et de fatigue parvinrent jusqu’à la devanture entretenue d’un chalet où flottait fièrement le drapeau Américain. A côtés, plusieurs attrapeurs de rêve semblaient apporter ce qu’il manquait aux couleurs de la nation. De l’artisanat local, tout comme les quatre rockin’chairs à l’entrée qui semblaient avoir été travaillé à la main.

Complètement épuisé, Scott s’arrêta devant la boite aux lettres. Il coupa le contact de sa moto puis fixa le nom d’un air étrange. “J.N BRADFORD”... Ca y est, c’était bien là. Greer avait encore du mal à réaliser. Impossible de se tromper, c’était bien sa destination.
Pour une fois, il tourna un regard sincérement chargé d’angoisse et d’un début de détresse vers sa collègue.

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Dim 11 Avr - 23:44

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Timber & Cross
Du 04 au 25.02
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Bicycle Road Rage

« Bradford, c’est là. », observa le Captain Obvious de la team avec une innocence désarmante, le tout servi avec un sourire d’encouragement à l’adresse de Scott.
Les dents serrées, il se sépara de son engin et se traîna comme un canard jusqu’à la boite au lettre. Il passa sa main sur le flanc de celle-ci où se trouvait le nom qu’il avait tant espéré voir. Aussi un moyen de gagner du temps.
La porte d’entrée s’ouvrit brutalement. Dans le fracas du bois et le claquement du battant, un homme sérieux aux traits burinés débarqua. Une gueule de bourlingueur qui avait su charrier de la merde dans tout le Pays et mater du criminel à la pelle. Son fusil de chasse s’était tout de suite levé sur Scott et Chenoa, sans distinction, avec une lueur si peu amène dans le regard qu’on doutait de la blague.
Quand il reconnut Scott, son expression s’assombrit et se figea.

Josh Bradford:





«Je n’ai pas commandé d’aspirateurs. Cassez vous.» Lâcha-t-il finalement.
«Salut Josh...c’est moi.» répondit Scott, les mains ouvertes, avec une émotion qu’il ne se reconnaissait pas.
«Joël Hicks.»
Scott se marra un peu en redescendant ses mains. Bien sûr, deux secondes de rencontre avec son mentor et l’identité volait jusqu’à la gueule de Timber. Peu importe, il y avait plus important sur le moment. Le copilote leva le menton avec un air fier et il le corrigea d’un ton sans appel.
«Raté. Scott Greer !»
«Tu as disparu.»
«J’avais à faire. Bon...tu comptes finir le boulot ?»
« Super, tu étais tellement proche de lui qu’il se rappelle même plus de comment tu t’appelles. Et on vient de se taper deux jours de bécane pour se faire accueillir par un fusil. », balança-t-elle d’un ton aigre sans vraiment chercher à le dire tout bas.
«Justement, quand le type tient un fusil, c’est pas l’heure de jouer la petite chatte bordel !» grinça Scott sans se retourner vers elle.
« Parce que j’ai l’air de miauler là ? ». Elle se dégagea de sa moto, la laissant sur la bécanne, pour enlever son casque. « Bordel. ». Elle était tentée d’alpaguer le Bradford en question, mais bon, puisqu’il s’agissait d’un pote à Cross…. Autant les laisser se retrouver. En fait, rien d’étonnant à ce que le gars lui pointe un fusil dessus, par moment elle ferait bien la même chose.

Scott s’était suffisamment approché pour avoir le canon plaqué contre sa poitrine. Josh Bradford tira les deux chiens des canons juxtaposés pour le prévenir qu’il ne rigolait pas mais il se plongea dans son regard en même temps. Il y vit le jeune homme qu’il avait laissé autrefois avant de prendre sa retraite. Le vieux retraité n’était pas né de la dernière pluie, il connaissait les repères, les mimiques. Il sentait bien le stress de Scott mais également sa sincérité. Il ne se trouvait pas en face de Joël Hicks. Après un dernier petit duel de regard, son expression commença à s’éclaircir et un début de sourire se dessina sur son visage.
Il n’en fallu pas plus pour qu’ils se prennent dans les bras. Le fusil pointait désormais sur le sol et Scott eut toute les peines du monde pour ne pas verser sa larmichette. Il sentait son regard humide au même titre que celui de Bradford.

«C’est si bon de te revoir, putain !»
«C’est réciproque mon garçon. Je ne m’attendais pas à ce que tu réapparaisses comme ça un jour.»
«Je sais...c’est à elle que je le dois en fait.»
«Cette jeune femme ?»

Scott se décala pour lui permettre de comprendre. Josh posa le fusil contre le mur et la détailla. Elle était d’ailleurs en train de commenter ce qu’elle voyait avec toute la discrétion qui la caractérisait, les deux mains sur les hanches, en marmonnant un truc du genre : « Ben voilà, c’est pas trop tôt, ils se font un câlin. ». Josh écarquilla légèrement les yeux en déduisant sa nature. Il en revint à Scott comme s’il venait de lui faire une surprise tout à fait inconcevable.
«Hé ben...si tu te fous pas de ma gueule fiston, c’est que t’as fait un sacré bout de chemin.»
«Qui l’aurait cru hein ? Je te présente Chenoa Pénikett, mon amie et collègue. On bosse ensemble dans l’armée et...»
Josh lui interdit d’en dire plus en levant une main. Il s’avança jusqu’à la jeune femme muni d’un air très avenant. Son regard et son non-verbal reflétait un intérêt et une profonde expérience des Amérindiens. Après lui avoir demandé si elle “lui permettait”, il tenta de nombreux dialectes allant de la côte Est jusqu’à la saluer en Navajo.

Un grand sourire ravi illumina son visage lorsqu’il comprit qu’il avait fait mouche.
«Ah, la retraite ne m’a pas rouillé. Je suis enchanté.»
Chenoa était surprise de constater qu’un “visage pâle” (comme dirait son facho de frangin) connaisse sa langue, quoiqu’il ne pouvait connaître que le “bonjour” comme beaucoup de gens dans d’autres langues.
« Pareillement, ravie de faire votre connaissance. C’est une coutume locale le fusil en guise de bienvenue ? J’suis jamais trop sortie du Colorado. », blagua-t-elle.
«Les visites des visages pâles sont plutôt rare ici.» répondit Josh en lui faisant un petit clin d’oeil, signe qu’elle n’était pas concernée. «Mais voilà que je manque à mes devoirs. Entrez, je vous en prie...»
«Merci Jo...»

Scott s’interrompit. Son regard avait été attiré par une toute petite silhouette planquée derrière le chambranle de la porte restée ouverte. Une petite tête en émergeait, une fillette à l’allure Amérindienne dilué dans un autre sang. Elle le lorgnait avec beaucoup de suspicion et de crainte.
«T’as pas perdu ton temps.» Lâcha Greer en donnant un coup de menton en direction de la petite.
«On peut voir ça comme ça, oui.»
Bradford posa une main sur l’épaule de son ami et l'entraîna dans le couloir. La fillette se réfugia aussitôt dans les escaliers pour les observer de loin. Son intérêt fût capté de manière hypnotique par Chenoa dès qu’elle lui apparut.

Josh les aména jusque dans le salon où la table avait déjà été dressée. Il tira les chaises et les invita à s’y installer.
«Deux jours de route.» Avait noté Josh. «C’est une très grande distance. Installez-vous, je vous en prie. Je vais ajouter des couverts.»
L’endroit était tout ce que l’on attendait d’une maison américaine typique. Des vieux meubles de famille chargé de services, de vaisselles, un coin bibliothèque avec un fauteuil en cuir très confortable près de l’âtre de la cheminée. D’ailleurs, une petite marmite se trouvait près du feu, le contenu rissolant doucement en dégageant une odeur alléchante.
Scott observa longuement l’endroit le temps que son ami installe deux couverts de plus. Le tintement suffit à appeler la petite fille qui tira son siège dans le but évident de vouloir s’installer auprès de Timber.
«Alors.» fit Josh en s’installant en dernier, trois bouteilles d’alcool différents sur la table. Il versa un whisky à Scott de façon parfaitement naturelle puis proposa silencieusement l’une des trois bouteilles à Timber. «Vous prenez quelque chose, Chenoa ?»
« Avec plaisir. », fit-elle non sans détourner son attention de la petite fille à qui elle venait de sourire en la voyant arriver. Elle était très typée amérindienne, et elle comprenait un peu mieux pourquoi Bradford s’intéressait autant à la culture en question. Elle examina les bouteilles avant d’opter pour la bouteille de rosé. « Ce sera très bien. », fit-elle en désignant son choix.

Braford servit son invité. Comme il en avait l’habitude, il donna à la petite une brique de jus de pomme dans lequel il venait de placer la paille. En réponse, elle lui offrit un grand sourire dont le soupir ne laissait pas présager le mutisme. Pourtant, elle ne lui avait pas dit merci ouvertement, à croire que quelque chose clochait.
«J’imagine...que tu ne m’as pas amené ton amie pour me prouver que tu savais accepter les amérindiens dans ta vie.» le chambra lourdement Bradford.
Il leva son verre et trinqua avec tout le monde.
«J’suis venu pour avoir ton aide, Josh.» assuma Greer, l’air sombre.
D’un geste rude et sec, il engloutit son verre de whisky et expira sous la brulûre qui devait, l’espérait-il, lui donner du courage.
«Chenoa est ma pilote. Moi je suis copilote...on bosse dans l’US Air Force.»
«Oh...» fit-il en ayant une très nette déduction. «Démarrage assez dur, Chenoa ?»
« Il a eu du mal à assumer de se faire piloter par une femme… qui le fait crier en plus quand elle pilote. J’vous laisse imaginer. », balança-t-elle nature peinture, ne saisissant pas vraiment le côté solennel de la discussion pour le moment. Elle était plutôt dans une optique conviviale, contente d’accompagner son copilote retrouver un vieux pote.

La conversation n’alla pas plus loin. Scott avait simplement placé sa demande d’aide envers son mentor et ce n’était pas tombé dans l’oreille d’un sourd. L’innocence de Timber était parfaite pour orienter la soirée sur de la détente. Que ce soit elle, Josh et même Scott, l’humour coula sur le récit de leurs voyage pour rallier la réserve depuis Denver. Greer se fît moins tendu avec le temps et il se permit même de sacrés commentaires sur la perte de son pari avec la serveuse. Ou la vieille mégère qui s’était imaginé tout un tas de film sur eux.
Ils rièrent un bon petit moment et Bradford leur appréta deux chambres pour qu’ils puissent poser leurs affaires et dormir. Au cours de la conversation, ils avaient convenu de rester plusieurs jours, sans véritablement fixer de limites, le temps de pouvoir se remettre de ce sacré voyage et préparer le retour. Il serait plus long encore.

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Lun 12 Avr - 9:39

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Timber & Cross
Du 04 au 25.02
2020
Bicycle Road Rage

Timber passa une bonne nuit (et le rosé ne devait pas y être étranger). Mais elle se réveilla avec la petite fille installée dans la couverture à côté d’elle. Josh lui avait confié discrètement qu’elle ne parlait pas depuis longtemps et qu’elle était Navajo. Attirance du sang, de repère physique ou tout simplement intéressée par la nature très innocente de la pilote, la fillette avait jeté son dévolu sur elle. Naturellement, Chenoa essaya de communiquer avec elle, tout en se montrant prévenante, plutôt enjouée à l’idée de savoir que la petite était Navajo. Elle apprit son nom par Bradford : Dolie. Ce qui signifait “oiseau bleu”. C’était un peu chauvin comme réaction, mais les liens du sang dans une tribue avaient quelque chose d’important qu’elle ne saurait pas vraiment définir. Le courant passait très bien. En peu de temps, une véritable complicité s’était tissée entre elles.
Bradford était quelqu’un de très apprécié dans la réserve. Il les invita naturellement à participer à la soirée qui rassemblait tous les indiens. Si Timber fût accueilli à bras ouvert, Scott eut le droit à des regards chargés de dédain et de jugements. Il n’en fallait pas plus pour qu’il se laisse embarquer. De son côté, Chenoa profita largement de la fête et de toutes les personnes avec qui elle put faire connaissance. Mais très tard dans la nuit, lorsque les festivités étaient en train de se tarir, elle trouva Scott ivre mort non loin d’une série de pick-up. Il avait voulu disputer un défi de beuverie d’un alcool local et s’était fait tout simplement plié par les autochtones.
L’imbécile chantait à tue-tête l’hymne Américain en étant largement appuyé sur Chenoa qui essayait de lui intimer l’ordre de se la fermer. Josh lui prêta aussi l’épaule. Ils parvinrent à le coucher dans son lit ensemble après une rude bataille pour l’interdire de retourner sur un défi qui n’existait plus...qui était terminé depuis longtemps.

Finalement, après avoir fermé la porte de la chambre et bien secoué par toute cette agitation, le vieil homme fixa Chenoa avec un sourire avenant.
« Nous avons la paix jusqu’à demain, Timber. Un thé de la région, ça vous ferait plaisir ? »
« Pourquoi pas oui, il m’a donné soif cet abruti. », déclara-t-elle.
Il connaissait son surnom et l’avait trouvé très drôle. Il n’était pas rare qu’il aperçoive les échanges dynamique entre Scott et elle, surtout quand elle attaquait sa virilité devant Josh. Étonnamment, il avait toujours une réplique particulièrement vicelarde et généralement portée sous la ceinture pour se défendre. Mais avec ce public qui lui tenait à coeur, le copilote en devenait soudainement plus sage. Ils se jetaient joyeusement sur la gueule avec un arbitre qui s’amusait de voir ce jeu de ping-pong.

Parce qu’il faisait bon au milieu de cette nuit. Que l’absence de pollution lumineuse permettait de voir la magnifique voûte étoilée, Josh amena son invitée jusqu’à l'arrière de la maison et l’installa sur le rockin’chair. Il lui tendit du thé ainsi qu’une couverture légère si elle sentait le froid lui attaquer la peau.
« Ca fait un peu plus d’un jour que vous êtes là. Et vous ne cessez de me regarder avec curiosité. C’est quelque chose que j’aime beaucoup chez les Navajos. C’est un trait du peuple. Ils aiment creuser, investiguer, comprendre... »
Le vieil homme se balança lentement à côté d’elle en prenant une gorgée.
« Vous avez le regard pleins de questions, n’est-ce-pas ? »
« J’ai toujours pleins de questions. Je ne sais pas si c’est un trait de mon peuple comme vous dites, mais vous semblez être un expert, alors je veux bien vous croire ouais. ». Elle le toisa, avant de reporter son attention sur les étoiles. La vue lui plaisait assez. Et le goût du thé aussi. La couverture était disposée sur un côté, pour le moment inutile, mais l’attention était bienvenue. Ça lui changeait de l’autre énergumène qui devait cuver dans sa chambre. Quoiqu’elle était un peu injuste avec lui car il avait quand même mis les formes pendant le périple, même s’il les camouflait sous ses airs de machos à la con.
« Vous savez, il m’a mené la vie dure au tout début, quand on nous a annoncé qu’on faisait équipe. Il a tout fait pour ne pas se retrouver avec moi. Rien que pour le faire chier, parce que je le pensais macho, j’ai tout fait pour qu’on reste ensemble, histoire de le faire changer d’avis. Puis j’ai plutôt senti que c’était mes origines qui l’emmerdait, et maintenant je découvre que son ami Bradford est plutôt calé dans le domaine… Alors je comprends pas. A dire vrai, je pense qu’il est juste comme ça Cross, c’est une tête de con et je pense que j’aurai été une belle blanche catho coincée du cul qu’il m’aurait fait chier aussi. C’est sa façon d’être, et que ce soit moi ou une autre, ça aurait été pareil. ». Comme d’hab, Chenoa avait la parlotte facile, et elle déroulait. « Bref, il n’osait pas venir vous voir, c’est con non ? »

Un large sourire étira les joues ridées de Josh.
« Il n’est pas “comme ça”. » fit-il d’une voix sincère. « Joël a été conditionné pour détester les Navajos. »
Il glissa son regard dans sa direction. En entendant encore une fois le prénom de “Joël”, elle s’était forcément tourner pour lui faire la remarque qu’il se gourrait encore une fois, mais n’eut pas le loisir de le lui dire.
« Joël Hicks. C’est son identité d’origine. La religion n’a rien à voir la dedans. C’est votre origine. Les Navajos. S’il a voulu vous écarter, je pense que c’était pour se protéger. Pas de vous. Mais de son passé. »
Josh fronça les sourcils.
« Je comprends mieux pourquoi il vous a fait venir. Et pourquoi il hésitait. Il ne savait probablement pas comment amener les choses...il ne vous a vraiment rien dit ? »
« Rien dit sur quoi ? Vous me racontez quoi là au juste ? C’est impossible qu’il s’appelle Joël Hicks. Je le saurai... », fit-elle en tâtonnant un peu. Elle hésita et finit par sourire un peu : « Vous me faites une blague ? C’est ça hein ? Je ne comprends pas... »

Josh avait prévu le coup. Il prit l’un des livres photos qu’il avait posé sur sa table basse et fît racler son rockin’chair pour s’approcher d’elle. Il feuilletait les premières pages...des photographies identifiantes de prisonniers. Certaines étaient très vieilles, noircies et cornées, d’autres plus récentes. Un gosse qui ressemblait à deux gouttes d’eau à Cross portait le petit panneau “Joël Hicks”.
Chenoa l’observait avec une attention accrue, ses yeux noirs épiant le moindre de ses mouvements.
« C’était quelques années avant notre rencontre. » lui confia Josh. « Scott vous a toujours semblé être le bon garçon d’une famille respectable ? Ou vous vous doutiez de l’existence de ce cliché ? »
Elle ricana un peu à la mention du bon garçon d’une famille respectable. « Scott ? Famille respectable ? Non, vraiment pas. J’ai jamais eu un collègue qui allait aussi souvent au mitard... », fit-elle d’un air distrait maintenant qu’elle observait la photographie qu’il lui montrait. C’est vrai qu’il y avait un air de famille, pour ne pas dire un air de ressemblance tout court, mais elle avait encore du mal à se dire qu’il ne s’appelait pas Scott Greer… A moins que les huiles du programme soient au courant et pas elle… Ce qui pouvait être logique, mais non quand même…
« J’ai passé ma vie à pourchasser les criminels, Chenoa. J’en ai fais mon métier...j’y ai misé toute mon existence. » lui avoua-t-il enfin.
« Tous les types que vous voyez là ont été arrêté. Joël aussi, durant un temps...il a bénéficié du Programme de protection des témoins. C’est pour ça qu’il possède une autre identité maintenant. »
Chenoa reporta son attention sur Bradford. Elle le sonda quelques secondes. Il ne se foutait pas de sa gueule, c’était du moins la conclusion à laquelle elle parvenait en détaillant ses traits. Elle ne savait pas quoi penser, ni quoi dire. C’était comme si on venait lui dire que Scott Greer avait été un ami imaginaire et qu’il n’avait jamais existé.
« Je…. je vous le répète, c’est impossible. Impossible. Vous… Putain mais vous savez dans quoi il bosse ? C’est impossible. Vous êtes qui bordel ? Vous faisiez quoi ? Vous étiez flic ? Et lui un criminel ? Mais c’est pas possible enfin... », finit-elle par conclure en se tournant vers l’obscurité alentours.
« Du calme. Du calme... » fit lentement Josh en levant posément les mains. « Les réponses vont venir. C’est pour ça qu’il vous a amené ici. Mais gardez votre calme. Ce que je vous dis est réel. C’est compliqué...et c’est pour ça qu’il n’arrive pas à le faire seul. Scott est là-haut, en train de cuver un alcool qu’il a prit pour du jus de fruit. Mais autrefois, il était Joël Hicks. »
Le vieil homme posa devant elle un autre album photo. Celui là respirait l’histoire et avait l’avantage d’être beaucoup plus joyeux que les révélations que Josh lui faisait.
« Je n’étais qu’un jeune lieutenant de police très naïf. Comme les autres, je ricanais souvent des Amérindiens qui avaient le courage de pousser la porte du bureau du Shérif. Je ne pourrai pas vous dire pourquoi. »
Il tapota les premières pages. Une tribu, des familles, des visages expressifs, neutres ou souriant.
« Un jour, je suis allé à l’encontre de mes collègues pour prendre une affaire. Parler avec les Amérindiens ne se fait pas comme ça...il m’a fallu longtemps. Mais j’y ai coffré le criminel qui sévissait. C’était...comme mettre le doigt dans l'engrenage. J’en ai pris une autre...une autre...et encore. Je suis devenu un spécialiste qui acceptait le silence des familles, celles qui ne voulaient que régler leurs affaires dans leurs cercles. »
A chaque fois que Bradford lui donnait une information, il tournait les pages. Cet album était chargé de la vie d’enquête dans la culture Amérindienne. Il était vraisemblablement allé d’une réserve à l’autre.
« Je ne fais que prêcher une convertie. Vous savez bien de quoi je parle Timber. C’est dur d’offrir sa confiance à un visage pâle qui ne connait pas votre vision du monde. Mais je l’ai gagné à force de m’y intéresser. J’étais doué pour ces affaires, j’étais le meilleur. Puis je suis tombé sur un fléau...ma chimère...le clan Hicks. »

Bien entendu que ça lui parlait. Elle était une victime… autrefois. Plus maintenant, du moins ne se percevait-elle pas comme ça. Cependant, cela réveillait quelques douloureux souvenirs chez elle, et elle ne savait plus trop où elle était. Elle était désorientée par les révélations. Tout cela ne pouvait pas être inventé, et elle voyait mal Scott organiser un coup aussi finement pour qu’elle tombe dans le panneau. Puis… Elle n’avait pas le sentiment qu’il lui racontait des conneries… Le thé ne l’intéressait plus, de même que la contemplation des étoiles, bien qu’elle eut donné cher pour se retrouver là haut, au manche, et fuir cette merde. Les mains jointes, elle continuait de fixer l’obscurité, sondant des ténèbres aussi indéchiffrables que sa situation actuelle. Une chose lui venait en tête réellement : le rire de Coyote.
Elle ne relança pas la conversation, murée dans un mutisme digestif. Elle avait besoin de faire le point, et en même temps, elle avait envie qu’il continue, sans en avoir vraiment envie en fait.

Bradford la fixa longuement. Il retira ses albums photo pour les remettre en place et il s’enfonça un peu plus dans son siège. Pendant quelques minutes, il se prépara un cigare qu’il alluma avec un plaisir certain.
« Vous n’êtes pas obligée de subir tout ça. On peut en rester là... » lui dit-il doucement en lui tendant le cigare.

Elle tourna ses yeux vers l’homme, le visage grave. Elle déclina de la tête l’offre de tirer un coup sur le cigare en précisant : « Je ne fume pas, merci. ». Elle se serait bien enfilé un whisky sec, mais ce n’était pas la solution non plus. Elle le toisa un instant. « Tirons le pansement complètement… Vous en étiez au clan Hicks…. Si vous me dites qu’il a un jumeau, je me fous une balle. », tenta-t-elle de blaguer, avec un rictus forcé, pour essayer de détendre l’atmosphère, ou plutôt pour essayer de se détendre elle.
Bradford ne répondit pas. Il la fixa longuement alors que ses traits se déstabilisait dans une forme de tristesse.
« Il a une demi-soeur très jeune. Elle s’appelle Dolie. » révéla-t-il soudainement.
Josh soupira en regardant en direction du niveau supérieur de la maison.
« Scott n’est pas au courant. »
Elle le toisa quelques secondes, la bouche en cul de poule. « Sérieux…. ? Je pensais que c’était votre fille ! Il va surement être content de le savoir. », fit Chenoa en opinant de la tête.

« Le clan Hicks... » fît le vieil homme. « ...s’attaquait aux Amérindiennes. »
Il parla doucement. Que Timber puisse comprendre le fond du problème, qu’il s’agisse de Scott comme de Dolie.
« Ils ont sévi sur les réserves durant une trentaine d’années avant de s’installer dans les environs de Denver. Le père de Scott était le chef de clan. Son fils était tout destiné pour prendre la relève. Il a été élevé dans ce seul but...jusqu’à ce que nos routes se croisent. »
Il termina dans un souffle.
« Et que je ne lui apprenne la réalité du monde. »

Elle venait de prendre un direct au foie. Et elle ne l’avait pas vu venir celui-là. Cette fois, un frisson glacé lui traversa l’échine et elle tira un peu la couverture sur elle. Elle comprenait pourquoi il les avait accueilli avec un fusil… Elle voyait aussi que le vieux Bradford ne semblait pas prendre de précaution vis-à-vis de Scott, ce qui pouvait laisser penser qu’il était certain de sa reconversion. Mais quand même.
« J’ai envie de dégueuler. », lâcha-t-elle d’une petite voix.
« Vous auriez dû accepter le cigare. » répondit-il avec une lueur espiègle.
Josh comprenait que ce n’était pas évident pour elle. Qui pourrait accepter tout ça sans démarrer la moto et fuir le plus vite possible ?
« Je vous sers quelque chose de plus fort ? » ajouta-t-il en pointant la tasse de thé refroidit.
« J’crois que ça fait gerber aussi le cigare.... mais ouais, si vous avez un digestif ou un truc du genre, je suis preneuse. ».
Braford prit le temps d’aller chercher de quoi la remonter sans empressement. Ces quelques minutes coulèrent en silence pour qu’elle puisse reprendre ses esprits. L’homme en revint avec une petite bouteille dont la vignette affichait des caractères en japonais.
« Un bon saké vous remettra sur les rails. » plaisanta-t-il.
Il la servit et attendit qu’elle veuille poursuivre les révélations...si elle le souhaitait réellement.
Le verre de saké fut englouti cul sec avant d’être reposé sur la table. La sensation de brûlure vint quelques secondes après et elle fit la grimace. Elle était entre deux mondes. Elle nageait en plein délire, peinant à croire que cette conversation avait belle et bien eu lieu. Néanmoins, elle avait besoin de savoir quelque chose :
« Vous dites qu’ils ont violé des jeunes femmes pendant trente ans. Où ? »
« De la côte Est jusqu’au centre Américain. » Avoua Bradford. « A chaque fois qu’ils déménageaient, je me faisais muter vers le prochain état. Le clan Hicks s’acharnait sur les Amérindiennes pour deux raisons : leur origine. Hurler des slogans au nom de Custer était souvent leurs signature. Mais aussi parce qu’ils ne savaient que trop bien le silence qui entourait leur culture. Pas de témoin, pas d’accusation, pas de jugements. »
Bradford se servit aussi un saké qu’il avala cul sec. Il versa de nouveau un fond pour Timber.
« A Denver, ils ont mené des raids sur votre réserve. Ils étaient devenus vieux, moins enclins à contrôler les victimes. J’avais mis les trois quarts de leurs effectifs criminels sous les verrous. Mais les autres étaient plus malin. Je vous mentirai... »
Il prit une grande inspiration.
« Si je ne vous disais pas que Joël a été un membre actif du clan durant ce temps. »
Chenoa resta mutique un moment. Scott devait être trop jeune à l’époque de toute façon. Ptet son paternel, ptet pas. Non, c’étaient des jeunes. Bref, elle s’en foutait. Toute façon Graham disait qu’il les avait scalpé ces connards. Alors à quoi bon ruminer ? M’ouais, n’empêche que ça faisait mal quand même.
« Et pourtant... », commença-t-elle après ce petit moment de latence. « … vous l’avez laissé dehors, avec une nouvelle identité et la belle vie. Pas mal. », fit-elle aigrie en reprenant son saké cul sec, amenant à une nouvelle grimace plus prononcée cette fois.

« C’est un raccourci que je comprends tout à fait. » admit-il doucement. « Mais l’histoire ne se finit pas de manière si arrangée. »
Il marqua une pause.
« Peu de temps après, alors qu’il étudiait à Denver, Scott a abandonné le clan. Il l’a laissé exsangue et à l’agonie. Pour le punir, il a été la cible de deux Uzis qui l’ont touché, ainsi que trois innocents qui y ont laissé la vie. Nous nous sommes rencontrés dans sa chambre d'hôpital. Et Joël n’était effectivement qu’un merdeux qui ne méritait que la peine capitale quand je lui ai parlé la première fois. »
Il hocha la tête.
« Mais comme pour ma carrière avec les Amérindiens, j’ai misé un acte de foi. Je savais Joël touché que trois inconnus soient décédés à cause de lui. Pourtant il ne connaissait que le crime, le désordre et le chaos. Il se montrait incurable...alors je l’ai mené au bureau fédéral. »
Bradford mira son interlocutrice avant de conclure son récit.
« Il y a vu l’envers du décors. Comprit que le monde ne se composait pas d’une hiérarchie bestiale. En l’échange d’une chance de refaire sa vie, Joël a témoigné contre son père...et reconnut les derniers membres du clans sur plus d’une douzaine de crimes. Ils ont tous été écroué à perpétuité. Ca a été l’aboutissement de la chasse d’une vie entière pour le bien des réserves et de toutes ses victimes. »

« Vous avez foi en lui alors ? », finit-elle par demander au bout de quelques secondes pendant lesquelles les bruits de la nuit avaient repris leur droit sur la conversation des deux humains. Ce n’était pas son genre de la fermer, mais là il fallait reconnaître qu’il y avait de quoi. Après la désorientation, la colère avait pointé le bout de son nez, et maintenant, elle ne savait plus où elle en était à nouveau, mais le curseur se situait au niveau de sa relation amicale et professionnelle avec Greer. Plein de petits aspects de leur relation conflictuelle prenaient sens désormais, et elle savait aussi que les rares fois où il lui avait fait peur, elle avait certainement frolé la catastrophe une seconde fois. Que penser et comment se comporter maintenant qu’elle le savait ? Dormirait-elle dans le canap d’un vieux motel moisi après avoir fait des blagues tendancieuses à la gérante, avec Scott dans la même chambre ? Serait-elle naturelle ou cette histoire lui pourrira l’existence ? Sa question à Bradford n’était pas anodine. Il avait sans doute douté lui aussi en le voyant débarquer, maintenant qu’il avait une petite protégée sous son toit, directement liée aux affaires du clan Hicks dont il était membre.
« Lorsqu’il a disparu, j’ai estimé qu’il était retourné dans ses vices. Qu’il avait brisé notre promesse pour retourner dans sa mauvaise nature, réitérer ses crimes. Mes contacts ne le retrouvaient pas, j’ai vraiment pensé avoir perdu le Scott Greer qui m’avait plu. L’enfant chaotique revenu sur le droit chemin. »

Josh eut les yeux humides. Il préféra fixer le ciel pour ne pas être découvert.
« Vous n’imaginez pas le soulagement que ça a été de comprendre qu’il était resté sur la bonne voie...et qu’il partageait un avion de chasse avec une Navajo. »
« Ouais… Avec une Navajo. ». Chenoa se leva, mais le saké vint se rappeler à son bon souvenir. Cependant, elle se stabilisa et elle s’appuya contre la rambarde pour regarder la nuit noire. « Si c’est pas une putain de blague digne d’un conte de Coyote ça. Une vraie putain de blague. ».
« Je comprends. Vraiment. J’ai suffisamment vu la souffrance dans les yeux de vos compatriotes pour légitimer votre réaction. Mais le jeune qui dort là-haut n’a plus rien à voir avec celui qui a pris ces quatre balles. Je ne chercherai pas à le défendre, ni à vous convaincre. Mais je me satisfais de ce que je vois...qu’il vous ai amené ici. C’est signe qu’il tient à vous...et vu son tempérament envers les Amérindiens, ce n’est pas anodin. »
« Tant mieux alors. J’ai pas envie de re… Enfin, que ça m’arrive quoi. Mais bon, je vous crois. Et je sais que malgré tout, je peux lui faire confiance. ». C’était qu’ils avaient vécu quelques beaux moments bien merdiques en comptant l’un sur l’autre quand même. Le genre de moment où la vérité fondamentale de quelqu’un s’exprimait naturellement. « Puis franchement, ce n’est pas plus mal. Il paye sa dette en me côtoyant, et je compte bien l’emmener à un Kinaalda la semaine prochaine à la réserve. Y a pas meilleur moyen de rassurer ceux qui ont eut peur de nous au point de nous faire du mal. ».
Bradford se surprit à rire.
« Le coeur d’un Navajo me surprendra toujours. Votre peuple a une ouverture, une perception de la vie bien différente de la nôtre. Ca a été mon moteur durant toutes ces années de traque. »
Il fuma tranquillement, tandis que Chenoa haussait des épaules, presque fataliste. Elle avait toujours vu le bon côté des choses malgré les emmerdes, et même si elle n’avait pas spécialement envie de le voir tout le temps, elle s’efforçait de le faire, ce qui pouvait la faire passer pour une niaise de temps en temps, mais qu’importe.
« Je dois reconnaître...que cette vie me manque malgré la cruauté et la misère. Je suis heureux de voir que Scott prend le même chemin que moi à votre contact. Dans un métier différent, certes. Maintenant...vous savez tout. »
L’homme resta pensif un instant.
« La vérité sur Dolie a été un fardeau. Vous venez d’en hériter, vous partagez le même sang. J’espère que vous réussirez à le gérer comme j’ai pu le faire. »
« Et comment je dois gérer ça ? Ne rien dire à Scott ? Ou vous allez le faire ? », finit-elle par demander.
« Croyez-moi, vu les circonstances, vous serez la seule à pouvoir lui faire comprendre que ce n’est pas une blague. Vous n’êtes pas concernée, Chenoa. Je suis navré de vous mettre ça dans les bras. Mais si je le fais... »
Il secoua négativement la tête.
« Il ira achever son père une bonne fois pour toute. Je vous ai suffisamment observé pour m'apercevoir que vous avez une influence très positive sur son comportement. Alors... »
« Alors je m’occupe du bébé et de l’eau du bain. », compléta-t-elle. Elle soupira, comprenant où il voulait en venir. « Faut que je trouve le bon moment. ». Et Dieu savait que Chenoa n’était pas la reine de l’approche indirecte et du message implicite…

Josh et Chenoa discutèrent longuement par la suite. Le sujet dériva un peu de façon salutaire autant pour l’un que pour l’autre. Bradford lui raconta de nombreuses expériences positives qui marquaient à jamais ses souvenirs. Il s’amusa également à trouver quelques points de culture étonnant des Navajos. Mais le sommeil finit par tomber sur eux deux, sans oublier l’aide particulièrement efficace du Saké.

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Mar 13 Avr - 16:56

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Timber & Cross
Du 04 au 25.02
2020
Bicycle Road Rage

Tard le lendemain matin, Scott se mit à grogner en remuant. Il avait instinctivement trouvé l’oreiller sur lequel son visage reposait, un filet de bave s’étant écoulé sur le long avant d’y sécher. Encore intégralement habillé, les bottes dans le lit et les draps malmené dans tous les sens, il tenta difficilement de ramper pour atteindre le bord du lit.

«Aaahhhh...ma tête...» souffla-t-il en se posant une main sur le front. «Putain d’emplumés avec leur alcool de patates...de choux fleurs...de fiente de ch’val et je sais pas quelle autre saloperie.»

Son regard se posa sur la table de chevet. Il fût surpris d’y trouver un verre d’eau et un tube de paracétamol. Il serra les dents pour se remettre dans une position plus adéquate, assis sur le rebord du lit, et il fît tomber deux comprimés effervescents. Rien que le bruit délicat du produit se diluant dans l’eau semblait le déranger tant il avait la gueule de bois. En soupirant, il se massa la nuque et balaya la pièce d’un regard circulaire. Il n’eut aucune réaction en y découvrant Chenoa...tout simplement parce qu’il n’y croyait pas.
Scott se massa les yeux et regarda de nouveau. Non, ce n’était pas une hallucination pourtant. Il regarda alors son lit, tourna le drap avant de murmurer d’une voix abîmée et parfaitement blasée :
«Quoi ? J’ai dormi dans ton pieu ?»

Chenoa avait fini par rejoindre la chambre de Scott dans la nuit, pour s’installer sur une chaise dans l’angle du mur. Elle était bien restée dans son lit, sur le dos, le corps tournoyant dans les vapeurs du saké, mais le sommeil se refusait à elle, même si ses yeux lui faisaient un mal de chien. Tel un zombi, elle était venue se poser dans cette chaise, pour observer cet homme dormir. C’était le copilote Scott Greer pour pas mal de gens, mais au final, ce n’était pas vraiment lui. Cela lui filait une sensation bizarre. Quelque part, elle se disait qu’il y avait quelque chose de louche chez lui, mais c’était facile à dire maintenant. Au fond, elle l’avait toujours trouvé un peu brut de décoffrage, mais il avait une certaine tenue quand il le voulait, même s’il pouvait être le pire des cons par moment.
La respiration paisible de Cross et les doux bruits ambiants de la nuit dans ce coin reculé n’aidèrent pourtant pas la jeune femme à trouver le sommeil. Pas plus que l’alcool qui circulait dans son sang et dont les effets s’estompèrent en allant vers le petit matin. Les effets joyeux. Le mal de crâne et la bouche pâteuse eux, s’installèrent durablement. Elle avait cependant dû s’assoupir quelques minutes, ou quelques heures, car elle eut un sursaut quand Scott bougea dans son lit, comme si elle revenait d’une transse qui lui laissa des timbales dans les oreilles. Putain de saké, elle n’en boirait plus !
Au final, elle pensait ne pas arriver à trouver le sommeil parce qu’elle avait maintenant une certaine crainte de lui, et voilà qu’elle s’endormait dans la même pièce que lui. En réalité, elle était plutôt troublée par les différentes révélations qui lui étaient tombées sur le coin de la gueule sans qu’elle ne les voit venir, plutôt que par la personnalité de Scott. Qu’il soit violent, elle le savait. Qu’il soit con, elle le savait aussi. Qu’il roule des mécaniques pour se la raconter, elle le savait encore plus. Qu’il se fasse passer pour le dernier des machos du coin, c’était une évidence. Maintenant, elle n’avait pas imaginé tout ça quand même. Au moins, il avait eut, à une époque, la hauteur de l’image qu’il essayait de se donner parfois.

Pourtant, il n’avait jamais dépassé les bornes avec elle, même s’il les avait frôlé très souvent, et l’épisode le plus marquant qui s’imposait à elle se trouvait en bas d’une échelle pour monter sur leur F-302. C’était la seule véritable fois où il lui avait fait peur et où elle avait cru qu’elle allait prendre une baffe dans la gueule, si ce n’était un coup de poing.
« Salut Joël. », balança-t-elle de but en blanc sans rebondir.

L’homme s’immobilisa, fronçant des sourcils. Il essayait de chercher la blague ou le contexte dans lequel elle employait son ancienne identité, n’y voyant que la fois où Bradford l’avait énoncé clairement. Son cerveau mit un sacré petit moment à faire la connexion pour lui mettre une autre hypothèse en évidence. L’expression de son visage se contrit d’une douleur qui dépassait clairement celle de sa gueule de bois et qui semblait gueuler un beau “Eh merde !!!”.
«Y’a erreur. J’m’appelle Scott !» répondit-il d’une petite voix, bien moins sûr de lui.
Il se leva en se tenant la tête entre les mains. Sa bouche claqua à cause du côté pâteux et il avisa sa comparse, se demandant si elle savait vraiment tout. C’était bien pour ça qu’il l’avait amené avec lui, qu’il l’avait invité pour ce voyage. Maintenant, il allait voir si le tas de merde qu’avait été son passé allait lui exploser à la gueule.
Scott hésita un instant. Il avisa la porte puis lâcha, comme s’il cherchait à apaiser un peu la situation ou se faire pardonner :
«J’te fais des pancakes ? Le dernier qui m’a vu cuisiner est fossilisé, profite...»

« Ok, “Scott”. », fit-elle en se levant en accentuant son prénom. Elle lui ouvrit la porte, sans le quitter des yeux.
«C’est moi qui passe devant à partir de maintenant ? M’bon...». Chenoa haussa des épaules, en augmentant l’ouverture de la porte pour l’inviter à passer effectivement devant.
Le copilote descendit en direction de la cuisine. Un mot se trouvait sur la table. Il le récupéra et le lu à haute voix :
«Parti faire les courses avec la petite. Ne vous étripez pas...»
Scott regarda Timber et reposa le papier. Il alla directement en direction du frigo et prit le nécessaire. La pâte datait de la veille mais elle était encore utilisable. Le jeune homme avait zappé son médicament, c’était bien le dernier de ses soucis maintenant. Il alluma la vieille gazinière et prépara tranquillement les poëles, n’ayant pas peur de tourner le dos à son amie. Une grande tension l’habitait au fond des tripes. On y était maintenant…
«J’me suis pas réveillé avec un couteau entre les épaules. C’est quand même bon signe. Par contre...»
Il la mira un instant.
«T’as vraiment une gueule à faire peur !»
« Ah ouais ? Cool... », fit-elle sombrement. Elle s’accouda sur le plan de travail, reposant sa joue sur son poing pour observer le jeune homme. « Puisque tu parles de couteau, tu sais comment mon peuple procède pour scalper quelqu’un ? », fit-elle sur le même ton monotone, alors que sa main libre se portait sur le fourreau en bois dans lequel était rangé quelques couteaux de cuisine. Elle en extirpa un qu’elle contempla tout aussi tranquillement, cherchant ses yeux dans le reflet de la lame.
Scott se mordit les lèvres. Sa main s’était raffermi sur le manche de l’une des poêles, comme s’il se préparait à se défendre. Mais finalement il secoua la tête et se nimba d’un sourire de roulure, comme il en avait l’habitude.
«Custer faisait la même. Cinq dollars le guerrier, trois la squaw. Je t’écoute ?»
« Toujours le pognon hein ? », fit-elle d’un ton détaché avant de se redresser. « Je te montre. », ajouta-t-elle en approchant, tout en guettant ses réactions.
«Tu crois me faire peur, Timber ?» lui demanda-t-il avec une lueur dans le regard. Il bazarda aussitôt les fontes pour ouvrir ses mains.
«Eh ben écoute, si tu veux mes putains de cheveux pour aller danser avec à la prochaine fête d’emplumés, je vais même t’aider tiens ! Regarde... »
Scott s’approcha de son amie, comme pour vérifier si elle avait bien peur ou non. Instinctivement, la main qui tenait le couteau se serra un peu plus sur le manche, mais elle conservait son air détaché qu’elle avait adopté depuis le réveil du jeune homme. Dans le fond, il comprenait et il n’allait pas se comporter comme un fumier. Il aimait bien se donner le rôle, le jouer, il l’avouait au fond de lui. Mais là, Chenoa avait appris la vérité sur son compte. C’est lui qui avait tout orchestré. Pas question de fuir comme une flipette, il assumait.
Petit demi-tour lent, les mains toujours en évidence, il se plaça ensuite à genou tout en lui tournant le dos. La position idéale.
«Voilà. Si ça peut te soulager, fait toi plaisir !» grogna-t-il en laissant ses mains retomber le long de ses flancs.

C’était vraiment un crétin quand il s’y mettait. Chenoa se retint de pousser un soupir. Pour le coup, elle était prise au dépourvu, et elle pensait pas qu’il allait se la jouer “victime”.
« Pfff, tu as les cheveux d’un alcoolique notoire, gras et degueulasse, tu veux que j’en fasse quoi sérieux ? », finit-elle par commencer à dire.
Scott attaqua pile à ce moment là. Il se retourna en agrippant l’une des longues jambes de son amie et la leva suffisamment pour la bloquer. Plus qu’une forte poussée pour la déséquilibrer et il veilla à la faire tomber lourdement au sol. Scott sentit ses vieux démons le reprendre et il exerça exactement ce qu’il faisait à l’époque. Il grimpa sur son amie, sa main valide allant se saisir de son couteau de chasse qu’il ne quittait jamais. La lame migra jusqu’à son cou, à l’envers, pour que le tranchant ne la menace pas.
«VOILÀ ! C’est ça que tu voulais savoir ?!?» râla-t-il brusquement, le regard noir.
Et voilà, elle s’était encore faite avoir comme une bleue par ses airs grandiloquents et ses talents de comédiens à la con. Il venait de lui faire à l’envers, et elle s’en aperçut au moment où elle se retrouvait sur le dos, le souffle coupé ne lui permettant pas de crier. Oui elle avait peur, d’autant plus maintenant qu’elle savait la vérité sur lui. Instinctivement, elle s’était cramponnée à quelque chose pour ne pas tomber, embarquant une partie de la vaisselle de leur hôte dans sa descente vers le carrelage. Elle avait lâché le couteau, mais à tâtons, alors qu’il venait appuyer sa lame sur sa gorge, elle parvint à le récupérer contre la partie basse du placard.
« JE VEUX RIEN SAVOIR !! », hurla-t-elle une fois que ses poumons purent reprendre de l’air. « Lâche moi ! », ajouta-t-elle, rouge de colère, tout en venant lui faire sentir la pointe du couteau dans le creux de son dos, à l’endroit où se situait les reins. Son frangin lui avait toujours dit que là, ça faisait mal et que c’était radical. Parfait qui plus est quand on est sous un homme.
Scott respirait fort. Un souffle profond et long, chargé de nervosité. Le regard rivé dans celui de Timber, mélange de tristesse et de colère, il resta immobile. Le jeune homme sentait parfaitement la pointe de la lame sur son dos et il la gratifia d’un petit sourire narquois.
«T’attends quoi ? Vas-y, bute moi !» la provoca-t-il d’une voix moins forte. «Je...m’appelle...Scott. T’imprime dans ton petit cerveau ? Scott ! Pas Joël !»
« Lâche moi bordel... », répliqua-t-elle aussitôt. Elle évitait de bouger parce que la lame sur son cou l’en dissuadait, mais elle pouvait toujours faire pression avec sa propre lame, ce qu’elle ne se priva pas de faire en piquant un peu plus fortement.
«C’est toi qui m’obéit, chérie. Pas l’inverse.» grogna Scott en augmentant la pression de son arme à même mesure que celle de Chenoa. «Je m’appelle comment Chenoa ?»
« Va te faire enculer, toi et ta putain de famille de psychopathe de merde !! », éructa-t-elle sans plier pour le moment.
«Carrément que j’ai une putain de famille de fêlés. Ma seule vraie famille, je te l’ai fais rencontrer, c’est Bradford. Je m’appelle comment Timber ?!? Tu vas le dire oui ou merde ?!?»
« Et tu crois vraiment que j’ai envie de t’appeler Scott alors que tu me menaces ? »
«C’est un système qui a fait ses preuves, ouais !» balança-t-il avec un sourire cruel. «Tu te décides ou tu me butes ?»
Le jeune homme donnait l’air du petit merdeux qui surabusait d’un léger avantage qu’il avait sur Timber. Pourtant, son sourire s’affaissa en une seconde, signe que c’était une belle comédie de sa part. Il en redevint tout à fait sérieux alors qu’il reniflait par accoup.
«Heu...ça sent pas le brûlé ?»
Et pile à ce moment-là, comme si ce fameux coyote voulait lui répondre directement, un énorme “Vrouffffff” s’échappa de la gazinière en même temps que de grandes flammes.
«MERDE !!!» Cria le copilote en se redressant sur le champ.
Il ne fit pas attention à la piqûre que le couteau lui laissa dans le dos sous ce mouvement trop soudain. Le jeune homme choppa sa collègue par l’avant bras et la remit sur pied. Il remarqua qu’en tombant, elle n’avait pas attiré la vaisselle mais également la réserve de torchon qui faisait un beau brûlot. Les flammes mordaient maintenant les rideaux qui s’embrasèrent sous le regard défait de Scott.
«Putain ! AU FEU !!!»
Il se jeta sur le canapé pour prendre un oreiller et monta à l’assaut des flammes.

Chenoa s’était relevée elle aussi avec une certaine rapidité. Elle embrassa la situation rapidement du regard.
« Oh putain de bordel de merde !! ». Couper le gaz, il fallait couper le gaz !! Elle se souvenait que la bouteille qui servait à alimenter la gazinière était à l’extérieur, elle l’avait aperçu la veille en partant à la fête. Aussitôt, elle s’élança à l’extérieur pour aller fermer l’alimentation en propane. Ceci fait, elle attrapa le tuyau d’arrosage du jardin et essaya de le ramener dedans. Mais il était trop court ! Elle l’alluma quand même pour laisser l’eau gicler dans la pièce attenante à la cuisine, se disant que ça limiterait peut-être la propagation.

Pendant ce temps, Scott avait réussi à éjecter les rideaux par la fenêtre. Il avait remarqué que la gazinière de fonctionnait plus, ne laissant plus que les torchons allumés. L’homme se munit stupidement de sa manche pour pousser le tout dans le lavabo et allumer l’eau à fond...mais c’est sa manche qui prit feu. Scott la secoua dans tous les sens. L’eau pissait pas assez dans le lavabo. Il cramait bon sang. IL CRAMAIT !!!!
«TIMBER !!!!»
Il parvint dans la pièce attenante où il la remarqua avec son tuyau d’arrosage. Son cerveau n’alla pas plus loin dans la réflexion et il se jeta devant le flux.
«ETEINS MOI LA GUEULE PUTAIN !!!» gueula-t-il d’une voix presque suppliante.
Chenoa ne se fit pas prier et elle l’arrosa scrupuleusement pour tenter d’éteindre les flammes sur son bras. Dans ces conditions, elle ne se posait pas de question. Elle aurait pu le laisser cramer, mais elle ne souhaitait pas lui faire du mal ni le tuer, donc à quoi bon.

Heureusement, son amie avait été très réactive et il ne sentait pas de graves brûlures. A vrai dire, il ne sentait pas grand chose à part l’envie d’exploser de rire. Sûrement le mélange détonant d’adrénaline entre leurs petites bagarre et la folie de voir que la baraque de Bradford avait failli prendre feu. Le pauvre gars serait revenu avec la gamine en trouvant son foyer en cendres. Ne vous étripez pas, qu’il avait dit sur le papier.
Scott regarda Timber. Il ricana nerveusement, coupant l’arrivée d’eau par la même.
«Ça...ça coûte cher le scalp.»
Et il ricana de plus belle.
Avant de prendre le poing de Chenoa dans la gueule. Laquelle secoua son poignet tellement elle avait tapé avec vigueur et qu’elle s’était fait mal.
« Putain…. putain !! »
Une main sur le pif, Scott dodelina avec un mi-sourire partagé entre la douleur, la colère, une furieuse envie de rire malgré tout.
«Vache...sacré crochet...» admit-il en s’approchant, les yeux humides à cause du coup reçu. Il se secoua la tête.
«Est-ce que...heu...on est quitte maintenant ?» ironisa-t-il.
Ce n’était pas une question. Il tendit ses mains vers son poignet.
«Allez, fais voir...»

« Laisse tomber... », râla-t-elle en se tenant le poignet et en se détournant. Putain ils avaient failli cramer la baraque de Bradord, c’était le bordel, y avait de l’eau partout, la vaisselle cassée… « Si on se prend pas un coup de fusil après ça.... », tenta-t-elle d’ironiser en constatant les dégats.
Scott ne l’avait pas écouté quand elle s’était détourné. Il n’en faisait qu’à sa tête et chercha à constater sa blessure. Il n’avait pas encore regardé autour de lui. C’était un massacre et ça sentait une odeur très forte de brûlé. La blague de Chenoa coula très bien et il se surprit à en rire.
«Et encore, tu connais pas la bête quand il se met en colère. Les jeux de mains au couteau, c’est rien en comparaison.»
Mais Chenoa se refusait toujours à lui montrer. D’ailleurs, elle commençait déjà à vouloir rouler le tuyau.
« Faut qu’on range, qu’on nettoie, qu’on fasse quelque chose ! »
«Tu prends la serpillière ou le balai ?»
« Je vais ramasser les débris après avoir sorti ce tuyau. ». Elle s’exécuta. Déjà son poignet commençait à faire moins mal et elle espérait qu’elle n’aurait pas une entorse ou une connerie dans le genre. Ca allait très certainement passer, et elle n’était pas peu fière de la droite qu’elle lui avait mise !

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Mar 13 Avr - 17:19

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Timber & Cross
Du 04 au 25.02
2020
Bicycle Road Rage

Pendant deux bonnes heures, Scott et Chenoa firent le ménage dans leur coin. Les mots s’échangeaient un peu, comme si la dispute était déjà passée. Le copilote s’évertua à faire sécher tout le salon mais son amie avait eu la main très lourde. Le feu ne risquait pas de déborder ici, en effet. Toutes les fenêtres ouvertes pour aérer, les rideaux jetés et la poubelle sortie, Scott revint après avoir remis le gaz.
Comme si de rien n’était, il reprit les poêles pour faire les fameux pancakes, même s’il commençait à être tard. Ça leur servirait du repas de midi, Bradford ne semblait toujours pas revenir de ses courses.
«Alors...tu m’en veux à ce point là ?» lui demanda-t-il en faisant couler la pâte sur la fonte bien chaude.
« J’sais pas encore. C’est tout frais. », fit-elle en s’écroulant sur une chaise, lessivée par le ménage.
«Tu l’aurais découvert. Il fallait pas que ça se fasse sur le Dédale.» avoua-t-il sérieusement. «C’est terminé tout ça. Sauf pour toi...vu que t’es une emplum...enfin je veux dire : une indienne.»
« Et alors, ça te pose toujours un problème ? », répliqua-t-elle sèchement.
Il ne répondit pas, alignant les pancakes dans une assiette vide.
«Tu comprendrais pas. C’est pas “Timber” qui me pose problème.»
« Je pensais que c’étaient les problèmes de Joël.... », fit-elle de mauvaise foi.
Scott lâcha sa spatule. Il regarda l’extérieur tout en plaçant ses mains sur ses hanches.
Elle était en position de force, Chenoa savait bien que toute cette histoire l’importait. Tout ce voyage, tout ça justement pour en arriver à ce moment là.
«Ok...» lâcha-t-il simplement.
Le copilote plaça la dernière crêpe dans l’assiette et il fit glisser le tout en direction de Timber. Il se servit une part qu’il fixa dans sa propre assiette sans y toucher. Il observa sa collègue manger en silence, partagé entre l’envie de lui en dire plus et celle de ne pas ouvrir la bouche. Scott se sentait humilié par la situation. Pourquoi ? Il ne saurait pas le dire.
«Quand je faisais pas les quatre cents coups là-dehors. Je finissais dans la cave de mon père chaque week end. Souvent c’était le ceinturon. Mais quand ça lui donnait envie, à ce putain d’ivrogne, il variait les plaisirs. La trique, le fouet. Une fois ça a même été l’antenne de bagnole. »
Il marqua une pause, plongé dans ses pensées. Il détournait le regard, les pieds croisés sur une chaise en face, les mains en bouclier autour de sa poitrine. Scott n’avait pas faim. Il avait même envie de dégueuler. Timber avait sûrement plus d'appétit mais elle n’en restait pas moins haineuse selon lui.
«Si je perdais. Je passais le week end dans cette foutue cave sans bouffe ni flotte. Même pas un sceau pour pisser. C’était...pour m’endurcir qu’il disait. Pour mon héritage.»
Il pointa du menton son couteau de chasse qu’il avait laissé sur le meuble, dans son fourreau.
«Un jour, je me suis acheté cette lame. J’me bastonnais dans la rue pour m’entrainer, j’en ai pris des branlées. Et j’ai fini par avoir mon père. Je lui ai glissé le couteau sous la gorge en lui promettant de l’ouvrir comme un porc s’il s’avisait d’me toucher une fois de plus. Je pensais avoir la paix. Je me doutais vraiment pas que ce soit...pire.»
Cette fois, son regard monta sur elle.
«La chasse. Window Rocks. C’était notre “terrain”. J’ai été initié. J’ai adoré ça et j’ai continué. Toutes les semaines ont y allait. »

Greer regarda par la fenêtre, l’air absent. Il avait le regard fuyant et il n’aimait pas cette confession. Mais la vie était vraiment étrange des fois. Qui aurait cru qu’il confierait ces horreurs à une représentante de ses anciennes victimes.
«Je me rappelle plus leurs visages Timber. Des fois j’essaie mais c’est flou. C’est toi, tes manies, tes mimiques. Ca me rappelle tout ça sans arrêt. C’est ma croix à porter, je porte pas si mal mon surnom.»
Il fronça les sourcils.
«J’étais un enculé et j’aimais ça. Il m’a fallu quatre balles, des pauvres mecs flingués avec moi alors qu’ils faisaient juste des courses...et Josh pour comprendre. Mais c’était trop tard.»
Il serra les dents.
«J’en veux aux emplumées Timber. Je les hais parce que...»
Scott n’avait pas envie de dire la suite. Il se força après un soupir vibrant d’angoisse.
«Si seulement...si seulement elles avaient parlé putain. Si seulement une seule avait parlé. On m’aurait coffré. Je serais peut-être pas à mon poste, t’aurait un autre copilote, et il y aurait eu moins de victimes.»
Le copilote hocha la tête.
«Je me trouve pas d’excuses. J’aurai dû crever pour tout ça. Mais il y a pas un jour qui passe sans que tu me fasses pas avoir du regret. Et que je me dise qu’il en aurait fallu d’une pour que tout s’arrête. Que mon père et le reste de sa clique de merde soit sous les verrous. C’est moi qui les y ai envoyé. Et c’était trop tard putain...tellement trop tard...»

Chenoa continuait de manger sans ne rien dire. La nourriture n’avait que le goût du sable qu’elle avait mangé petite quand on l’avait laissé pour morte dans le désert. Tout ça lui rappelait de terrible souvenir, et si elle mangeait, c’était juste pour donner une bonne image. Rien de plus. Elle écoutait, mais il parlait beaucoup, et certainement qu’elle ne retiendrait pas tout, mais une chose était certaine, c’était qu’il se livrait.
Néanmoins, si pour lui cela le soulageait, ce n’était pas le cas pour l’amérindienne. Ca lui donnait des aigreurs même. A l’écouter, il était une victime, victime de son père, du système, du mutisme des autres. Elle se souvenait très bien des femmes quand elle était revenue après son viol. Aucune ne voulait qu’ils aillent voir la police. Aucune. Elles étaient aussi lâches que lui.
Au bout de quelques minutes à l’écouter, elle se rendit compte qu’elle avait arrêté son geste, laissant sa main en suspend dans le vide avec un morceau de pancake dedans. Elle termina de le mettre dans sa bouche, le regard dans le vide.
« Tu… tu peux te chercher autant d’excuses que tu veux Scott, mais tu étais conscient de tes actes. », finit-elle par dire en tournant son regard noir vers lui. « Ca me va d’être ta pénitence pour un temps dans ta vie. Ca me va bien. J’suis contente de savoir que ça te fait lutter, que ça t’oblige à regarder ton passé, à assumer qui tu es devenu, tout en portant ton fardeau. Ca n’aurait pas pu être meilleure fin. »

Scott souffla par le nez, moqueur.
«Si tu crois avoir un moyen de pression sur moi, tu te gourres. Je deviendrai pas ta pu**. »
Chenoa l’assassina du regard. Il avait toujours le don de l’agacer, c’était déjà ça.
« Mais ouais, je suis connue dans tout le Dédale pour faire chanter les gens ! Putain, t’es vraiment con. »
«Signe que j’ai pas changé. » S’enjoua-t-il, heureux de pouvoir l’emmerder comme d’habitude. «Au fait, tu la trouves comment ma cuisine ?»
« Dégueue ! », balança-t-elle encore une fois de mauvaise foi en poussant son assiette. « Hé Scott, on est partenaire, t’es mon copilote, on commence à être pote, mais je te préviens, le prochain coup que tu me fous un couteau sous la gorge, tranche là moi parce que sinon je te tue ensuite. ». Elle semblait sérieuse, alors qu’elle se levait, considérant que les choses avaient été dites.
«Tu me prends pour qui ?» Lâcha-t-il à la volée.
Il se redressa à son tour et récupéra son couteau de chasse qu’il tira de son fourreau.
«Y’a qu’un tranchant sur cette lame. Et elle était pas du bon côté...»
Avec son air provocateur habituel, il ricana et referma son couteau dans l’étui. Il lui balança son arme dans les bras, ne sachant pas trop si elle allait l’attraper. Scott ajouta, presque heureux de le dire :
«Tu t’es fait avoir. J’t’ai fais un putain de coup de bluff. Toi, en revanche, tu m’as percé un trou entre les reins. C’est très intelligent de viser là...t’es pas aussi “victime” que tu laisses paraître.»
« Et toi tu m’prends pour qui ? », répliqua-t-elle en laissant passer son couteau pour qu’il tombe par terre.
«Pour quelqu’un qui a cru pouvoir me foutre les foies avec un couteau de cuisine...»
Il lui fit un clin d’oeil.
«J’dis pas, pour un autre ça aurait pu marcher.»
« T’inquiète, on en reparlera. », fit-elle en opinant du chef.

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Mar 13 Avr - 17:32

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Timber & Cross
Du 04 au 25.02
2020
Bicycle Road Rage

Scott entendit également le bruit d’un moteur ronfler dans l’allée. Il écarquilla un instant les yeux, se disant que la petite allait tomber sur son couteau qui traînait sur le sol. Le jeune homme s’élança prestement pour le récupérer et glissa à sa partenaire, tandis que la porte s’ouvrait.
«Je t’entrainerais à manier un couteau, promis.»
La petite Dolie émergea aussitôt dans le salon. Un ballon gonflé à l’hélium dans une main, le visage couvert d’un papillon maquillé et les lèvres encore chargé en sucre, elle courut droit sur Timber pour se présenter à elle. Dolie semblait fière de lui montrer son papillon et son beau ballon, à tel point qu’elle s’était pressée de l’atteindre. Timber était visiblement sa priorité du moment malgré son mutisme. Josh, lui, vint beaucoup plus tranquillement. Contrairement à la petite, il remarqua tout de suite que quelque chose n’allait pas.

« J’ai fais l’erreur de croiser le parc d’attraction ambulant. » fit-il sans éprouver le moindre regret.
Alors qu’il posait les courses, son regard tomba sur la gazinière et il remarqua illico les traces de brûlures, l’absence de vaisselle et de torchon ordinairement en place.
«Chenoa a foiré la bouffe.» lâcha Scott dans une parfaite hypocrisie. «Les femmes, tu sais ce que c’est...»

Dolie parvint à grimper sur la chaise et fixa d’un regard intéressé l’assiette que Timber avait repoussé. Il y avait encore la moitié d’un pancake dedans. Pour formuler sa demande, la gamine tendit la main vers le reste tout en fixant Chenoa, un air amusé et pétillant dans les yeux.

Chenoa ne prêta pas attention à la remarque à la con de Scott, concentrée sur la gamine. Elle l’aimait bien cette petite, et maintenant qu’elle savait qu’elle était le fruit d’un viol, elle en avait conclu qu’elles avaient une certaine forme de lien. Par contre, elle ne savait toujours pas comment annoncer le truc à Scott.
« Tu en veux ? », Chenoa poussa l’assiette vers elle, et ajouta : « Tu vas voir, ils sont supers bons, c’est moi qui les ai fait. ». Voilà, il avait qu’à fermer sa gueule l’autre ahuri.
Dolie était aux anges.

Elle tourna son regard vers Bradford tandis que la gamine mangeait son bout de crêpe, et elle s’excusa silencieusement pour les dégâts. L’expression du policier en retour lui fit comprendre clairement qu’il n’était pas dupe. D’ailleurs, il profita que Scott rangeait les courses pour prendre la main de la jeune femme et y constater les rougeurs naissantes sur ses phalanges.
« Quand papa n’est pas là, les enfants font des bêtises. » glissa-t-il en double sens.
Scott comprit une référence au début d’incendie dont Timber portait le chapeau, ce qui le rendait plutôt jouasse. Mais en réalité, Josh comprenait qu’il y avait eu altercation durant son absence. Il passa son pouce sur les rougeurs comme s’il voulait les faire disparaître et reprit de manière énigmatique :
« Je ne peux pas vous laisser de grosses responsabilités, c’est bien dommage. »
Chenoa récupéra doucement sa main, et elle tira la chaise à côté de la jeune fille pour s’installer à côté d’elle et croiser ses longues cannes devant elle.
« J’vous dédommagerai pour les dégâts. », ajouta-t-elle.
« N’y pensez pas, Chenoa. Un petit coup de peinture, quelques emplettes avec cette adorable petite aventurière et l’affaire sera réglée. Vous avez pu vous reposer un peu ? »
« Dommage qu’on ne reste pas plus longtemps, je vous aurai filé un coup de main à retaper quand même... », éluda-t-elle, en restant fixée sur le fait qu’elle était responsable de ce bordel et qu’elle devait réparer. Finalement, elle soupira, tout en caressant les cheveux de la gamine.
« J’vais aller me reposer un peu, Scott, tu t’occupes un peu de la petite. Je compte sur toi ! ». Chenoa se leva, fila une claque amicale sur l’épaule du concerné, ce qui lui rappela que son poignet avait quand même morflé, et elle s'éclipsa vers sa chambre.

Quand Chenoa se réveilla, le soleil était en train de décliner et elle se sentait brumeuse. Elle comprit quelques secondes plus tard que Josh était entré dans sa chambre et qu’il lui avait déposé sur la table de chevet un bol de café bien chaud. Le genre à sentir bon et ne pas être fait avec de la sous-marque. C’était son truc apparemment, les petites attentions sur la table de chevet. C’était donc lui qui était passé chez Scott lui filer des cachets et un verre d’eau.

Dans le silence très paisible de cette maison, des cris de gamins montaient parfois. Comme un animal cartoonesque, cliché du coyote ou du grosminet qui course sa proie. Ca provenait du jardin. Elle y vit Scott émerger du détour de la maison, la gamine sur les épaules, faisant celui qui ne contrôlait plus ses membres. Même muette, la petite avait le visage hilare, ses doigts fins accroché sous la mâchoire de Scott qui faisait le pitre. A chaque fois qu’elle appliquait une pression, il changeait de cap. Le copilote s’arrêta soudainement sous la fenêtre de Timber, ne sachant rien de sa présence, et poursuivit son petit jeu. Il était maintenant courbé comme un tyrannosaure, faisant des embardées pour chercher la petite fille qui se trouvait juchée sur ses épaules. Il repartit ensuite dans une démarche de poule, ayant certainement voulu répliquer celui du T-Rex, avant de disparaître à l’autre coin du bâtiment en poussant un rugissement trop peu crédible.

Chenoa ruminait les différentes expériences de vie qu’elle avait partagé avec, pour commencer, Scott, puis Bradford, puis la petite, Dollie, puis re Scott. Elle remarquait qu’elle essayait d’être en colère contre son copilote mais elle devait reconnaître au fond qu’elle ne l’était pas, et du coup, elle avait une forme de rancune contre elle même, le genre de rengaine qui ne veut pas vous laisser tranquille et qui vous ronge. Pourquoi ? Elle avait à portée de main une ordure, une de ces ordures qui avait décidé de briser son enfance, ou à tout le moins son adolescence, et, par voie de conséquence, la possibilité de se venger une bonne fois pour toute de cet odieux affront subi il y a de ça plus de dix ans maintenant. Elle se pensait guérie, elle se pensait soignée, hors d’atteinte et elle devait reconnaître que cela continuait de la ronger. Elle pensait qu’il n’était pas nécessaire de se venger de ces hommes mais au fond c’était un sentiment parfaitement normal qui animait cette rancune.

« N’importe qui en aurait envie… », murmura t elle dans la pénombre de la chambre.

Ses sombres pensaient liées à l’injustice crasse dont elle avait été victime (et ce n’était pas les scalps arbitraires de Graham qui l’avait finalement apaisée), furent chassées par des cris de gamins prébubères tonitruant et fortement exagérés. Chenoa se redressa dans son lit. Elle n’avait envie de voir personne mais sa curiosité sans limite lui fit ouvrir les rideaux pour constater que Scott était en train de jouer avec Dollie dans le jardin de la propriété. Cela fit sourire la jeune femme qui ouvrit la fenêtre pour poser ses coudes sur le rebord et les observer passer.

« Bon on dirait que les relations entre frangin frangine démarrent plutôt pas mal ! », s’amusa t elle.

Quand Scott disparu de l’autre côté de la maison, Chenoa laissa la fenêtre ouverte, trouvant que ça sentait le bouc dans la chambre, et elle se dirigea pour retrouver Bradford dans la cuisine, occupé à préparer le dîner du soir.
La jeune femme attrapa un couteau de cuisine, et s’installa sur le tabouret du plan de travail pour l’aider à éplucher les légumes.

« On dirait que Dollie s’est fait un nouvel ami. », fit elle pour lancer la conversation.
« Vous restez indétronable, Chenoa. » assura le vieil homme avec un sourire complice.
Il en était à peler les pommes de terre.
« Scott a eu bien du mal à se motiver. Mais une fois lancé, il développe un aspect paternel très surprenant. Ca doit probablement lui rappeler son “fils volé”. »
Bradford continua de peler les pommes de terre sans se rendre compte, il avait fait une très longue bande de pelure qui finit par se briser. A ce moment-là, le regard de Josh monta vers Chenoa et il s’immobilisa. Au début, il ne comprit pas son air dubitatif. Puis finalement, la connexion se fit dans son esprit et le retraité secoua la tête.
« Décidément... »
Il prit une nouvelle pomme de terre.
« Je pensais que vous partagiez une certaine complicité. » regretta Josh.
Chenoa était sur le cul et ce n’était pas peu dire. D’ailleurs, elle avait arrêté de peler ses légumes.
« Et moi donc... », maugréa-t-elle. Elle allait en apprendre combien des comme ça encore ? Au final, elle se rendait compte qu’elle ne savait pas grand chose de son passé, de lui en général, et pourtant, elle se souvenait très bien avoir tenté de percer quelques secrets, et pour ce qui était de Bradford, elle avait dû mettre les moyens pour le lui arracher. Elle se souvenait même avoir essayé le chantage dans le F-302.
L’homme marqua une longue pause. Il songea qu’il se devait de continuer puisqu’il avait abordé le sujet. Il poursuivit son travail tout en racontant l’histoire :
« Pour repartir de zéro, Scott s’est fait embauché sur le tarmac d’un aéroport en bordure de la frontière Canadienne. Il est resté à l’écart des réserves et il a refait sa vie comme promis. J’ai su qu’il s’était marié avec une petite blonde nommé Eliza, il lui a fait un enfant qu’il attendait impatiemment. Un fils. »
Bradford parlait posément.
« Un ou deux mois avant le terme, il a appris que son collègue était passé avant lui. Et que l’enfant n’était pas de Scott. Divorce, déchirure, il a disparu peu de temps après. Vous comprenez pourquoi je m’étais inquiété sur son possible retour au crime ? »
« Je comprends... », fit Chenoa en reprenant ce qu’elle était en train de faire avant que le vieil homme ne lâche sa bombe. Elle était songeuse. Décidément, Scott était un connard fini qui avait mené la vie dure à des jeunes filles comme elle, pour ne pas dire qu’il en avait certainement brisé quelques unes qui avaient fini par se suicider, et Chenoa trouvait que la vie le lui rendait bien. Ce n’est pas justice de se faire cocufier, et ce n’était pas à souhaiter, surtout dans ces conditions et dans la perspective d’être père.
Chenoa ne la connaissait pas, et elle ne savait pas comment Scott était avec, mais cette Eliza était une salope !
Voilà.
« Je pense qu’il aura toujours cette part d’ombre en lui. Vous savez, il passe régulièrement du temps au mitard à la base. J’arrive jamais trop à savoir pourquoi, mais bon… Le fait est qu’il se fait chopper et même si à l’armée on a le “trou” facile, il y va trop “facilement” à mon goût. C’est qu’il doit chercher. », observa-t-elle en faisant une pause dans ses pelures. « Mais au fond, c’est un gars bien et qui a des principes, ça me fait chier à dire parce que… parce que j’ai vécu ce qu’il a fait à d’autres… », avoua-t-elle à demi mot, s’empressant d’ajouter pour que la conversation ne dérive pas sur elle. « … et que j’aimerai qu’il y ait un semblant de justice, et je sais qu’à votre niveau vous avez consacré votre vie à ça et je vous en suis infiniment reconnaissante, mais ce que j’veux dire, c’est que Greer, c’est un connard, un gros bâtard même quand il s’y met, mais il m’a jamais laissé tomber même quand on était dans la merde la plus totale et qu’il aurait pu s’en tirer en me laissant crever, vous voyez ? Au fond, vous avez réussi votre pari mon vieux, et maintenant que j’ai récupéré la bête du diable, je vais tâcher de le faire poursuivre sur le bon chemin. ». Chenoa opina du chef comme si elle était convaincue de ce qu’elle disait. Elle ponctua même sa phrase par un nouveau bruit de bouche d’assentiment, avant de reporter son attention sur la patate qu’elle termina de scalper avec dextérité. Elle venait de sortir un monologue spécial Penikett, avec le jargon familier qui allait bien, et elle continuait de secouer positivement la tête en s’attaquant à une autre pomme de terre.

Le retraité écoutait bien sagement le monologue de son invité. S’il l’avait pu, il aurait réduit le volume de la radio pour pouvoir se concentrer davantage sur les différents éléments que l’Amérindienne lui partageait. Mais en fin de compte, avec Scott dans les parages, cette couverture sonore était la bienvenue. Il considéra un instant les propos, très étonné d’apprendre que Chenoa avait été une énième victime, même si cela ne se réservait qu’à son toi. Professionnellement parlant, il n’aurait pas sourciller face à cette déclaration.
L’entendre faire un jugement de Scott le tirailla quelque peu mais il reconnaissait qu’elle tombait juste. Mieux, il avait la preuve que le jeune homme avait suivi la bonne voie malgré quelques écarts discutable...et ce comportement qui ne changera jamais vraiment. La mention de la “bête du diable” le fît sourire et il attendit un petit instant avant de répondre.
« Vous faites vibrer mon vieux coeur, Chenoa. » lui avoua-t-il. « Je reconnais que ça doit être difficile pour vous. Mais me concernant, je ne pouvais espérer meilleure rédemption pour notre criminel. »
Il acquiesça, certain de son fait.
« Je suis heureux de savoir qu’il est tombé sur une personnalité aussi riche que la vôtre. Les Navajos règlent généralement les problèmes autrement. Et à juste titre... »
En parlant des “problèmes” que réglaient les Navajos, Bradford avait sciemment caressé la lame de son couteau avec le pouce.
« Je vous en suis très reconnaissant.»
Chenoa fit un petit bruit de bouche pour marquer le fait qu’elle était entièrement d’accord avec lui. Les Navajos avaient une manière de régler les problèmes qui passait par la lame d’un couteau qui racle sur une tête. Tout un art. Qui allait se perdre avec le temps. Enfin qu’importe.
« Ouais… mais je ne suis pas super fan des poils, alors vous comprenez... », fit-elle en faisant un geste de dédain, histoire de faire un peu d’humour dissimulé pour ne pas affronter ouvertement la reconnaissance de cet homme.

Au fur et à mesure de la discussion, Josh préparait les légumes et commençait à les faire cuire. Une délicieuse odeur de patates sautées avec de la farce et une série de légume commençait doucement à monter. Il n’était pas rare de voir Scott passer au travers des vitres en pourchassant la petite fille. Il s’arrêta soudainement à celle qui donnait sur la cuisine, remarquant la présence de Timber. Il y écrasa rudement sa tronche pour se donner un air de Frankenstein. La petite Dolie, qui était revenue, fit de même avec un sourire ravissant, transformant le doigt d’honneur que Chenoa allait faire à Scott en un délicieux et hypocrite coucou. Jusqu’à ce que Scott ne gueule :
«HE SQUAW !!!! ON A FAIMMMMMM !»
Dolie embrassa la vitre avec le regard pétillant d’amour. Elle repartit aussitôt, pourchassée par Scott qui lui chatouillait les bras. Heureusement, celle-ci s’amusait trop pour comprendre la boutade. Bradford soupira en le voyant agir comme un môme.
« Je me demande sérieusement lequel des deux est le plus mature. » plaisanta celui-ci en disposant un verre à digestif devant l’indienne. Il en fit de même pour lui et, pendant que le plat rissolait tranquillement avec une odeur délicieuse, il lui versa un alcool de prune en petite quantité.
« Et vous ? Chère invitée... » Lâcha-t-il en s’installa sur la chaise à côté d’elle. « Parlez-moi de vous. Vous êtes native des Window Rocks de ce que j’ai compris. Il est rare que ses représentants s’aventurent à l’extérieur. Qu’est-ce qui vous a mené jusqu’aux manettes d’un avion de chasse ? »
« Oui c’est rare, parce que les amérindiens pensent que leur monde se limite à leur réserve, celles que les Américains ont décidé de nous laisser. Mais bon, quand on est curieux, on voit que le monde est plus vaste que ça… Il est au moins tout aussi vaste que nos mythes le laissent penser. », fit-elle sans en dire trop, parce que ça restait quand même top secret. « J’ai toujours eu envie de voler, et au final, quand on a vraiment envie d’une chose et qu’on se casse le cul pour y arriver, on y arrive. », fit-elle avec un sourire, en prenant place sur la chaise qui restait pour taper dans le verre de prune.

Josh Bradford prit pas mal de temps à discuter et connaitre “Timber”, l’indienne qui avait su se faire respecter de Scott. L’ancien flic n’était pas stupide, il savait qu’il fallait un caractère bien trempé pour répondre au comportement branleur de Greer. Il prit donc un plaisir certain à décortiquer sa personnalité, la découvrant au terme de la conversation, tout en se rappelant la tragédie qui avait été la sienne. L’homme avait misé toute sa vie dans la recherche et la lutte contre ces crimes orchestrés par des semblables. Mais quelque chose faisait que c’était comme un accomplissement, comme une page qui se tournait une bonne fois pour toute, en voyant Scott en compagnie de cette jeune femme. De savoir qu’il volait, s’entrainait, se battait ensemble. Qu’ils avaient voyagé ici pour lui dire, quitte à incendier sa cuisine, c’était quelque chose qui le marquait agréablement.
Une promesse, quelque part, que Scott ne redeviendrait jamais plus ce qu’il avait été. Et que cette jeune femme ne pouvait pas avoir été au meilleure endroit pour lui faire porter la croix. Pourquoi pas, en étant fous, songer que cette Chenoa pourrait également tirer un trait sur son passé en remarquant qu’un ancien pourri pourrait être un allié puissant ?

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Mar 13 Avr - 18:32

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Timber & Cross
Du 04 au 25.02
2020
Bicycle Road Rage

Le retraité discuta longtemps après que les légumes eut été pelé et placé au four, en forme d’une tarte à l’odeur déjà très appétissante. Ils se retrouvaient à discuter alors, dans une parfaite longueur d’onde, des traditions Navajos. Josh prenait un plaisir certain à se faire corriger sur des idées et de fausses déductions qu’il avait eu. Ca l’étonna un peu de savoir qu’elle comptait embarquer Scott jusqu’à la réserve et il préféra ne rien dire, persuadé que ce serait un sujet à discorde entre ces deux là.
Greer, de son côté, s’était endormi dans un siège confortable, bercé par la télévision qui ne présentait que des informations fragmentés par les parasites. Dolie, elle, faisait tranquillement ses dessins en essayant de représenter tant Scott que Chenoa.

Le temps passa vraiment rapidement.
C’est toujours comme ça lorsque l’on passe un bon moment de répit. Après avoir sorti la fameuse tarte du four et préparé un dernier apéro, la fine équipe se retrouva à table. Scott ne se montra pas forcément joyeux, perturbé par le fait qu’ils repartiraient tôt le lendemain matin comme convenu. Ils trinquèrent puis le repas se déroula sous de joyeux anecdotes. Étonnamment, Scott livra quelques méfaits de petites frappes qui tenaient plus du comique que du criminel. Il raconta comment, une fois, une expédition pour cramer toutes les copies d’une classe en échec s’était transformée en virée à bord de la corvette du prof avec son amante ayant supplié le voleur de l’embarquer pour fuir le domicile.
Du WTF par excellence ponctué d’un tas de petites précisions dont Scott se permettait l’ouverture, bien aidé par l’alcool, bien qu’il veillait à éviter les grossièretés sous le nez de Dolie.

La nuit était bien entamée.
Scott partit fumer à l’extérieur en compagnie de Josh. Penikett ayant été distraite par le fait de coucher la petite à l’étage.
« Je suis content pour toi, Scott. C’est quelqu’un de bien. »
«J’dirais pas le contraire. Des fois, j’me demande même si je mérite d’avoir son amitié. Je pensais que ça serait resté pro.»
« C’est impossible mon garçon, tu le sais bien. Vu votre passé, à tous les deux. »
«Tu lui as tout dis ?»
Bradford tira longuement sur sa pipe, signe d’assentiment.
«Je savais pas comment le faire tout seul.»
« Elle t’aurait ejecté au-dessus de la Syrie. » blagua le vieil homme.
Scott ricana tout en enfonçant ses mains dans les poches.
«Est-ce que je peux te demander quelque chose de...vraiment personnel ?»
« Bien sûr. »

Scott tenta de tirer sur sa clope mais le tabac ne lui disait plus grand chose. Ca l’emmerdait même. Il jeta rageusement son reste avant de souffler.
«Est-ce que tu crois que...si je la protège, si je veille sur elle, ça pourrait...»
Il hésita.
«Enfin, j’sais pas. Si ça pourrait arranger les choses...un peu. Équilibrer la balance. Tu vois ?»
« Tu es un grand garçon, Scott. Je ne vais pas choisir à ta place. »
Le copilote tenta de dissimuler sa déception. Le silence retomba quelques instants.
« Mais ce n’est pas la vraie question, n’est-ce pas ? »
Là, il cessa de respirer, le fixant avec un air fermé.
Scott ouvrit la bouche pour lui répondre quelque chose mais il ne trouva rien. Rien du tout.
Bradford piquait pile au bon endroit et il mettait la main dessus. Comme s’il avait été à l’interrogatoire et qu’il se faisait avoir comme un bleu.
«Fait pas le flic, putain.»
« J’énonce juste une évidence, fiston. Tu aurais réussi à lui révéler ton passé sans moi. Et ce n’est pas dans ton genre de faire dans la protection. Donc...c’est bien ce que je pense ? »

Scott serra la mâchoire et s’éloigna un peu. Il ne réussissait pas à mentir à sa figure d’autorité. Son père n’était pas Hicks. C’était Bradford. Et putain, ce qu’il pouvait bien jouer le rôle. Il lisait en lui si facilement…
Scott voulut passer sa frustration sur le garde-fou de la terrasse mais se ravisa. A la place, il se retourna pour le fixer. Il n’aurait jamais pensé que ça lui aurait autant couté d’acquiescer. Cela fit sourire Bradford, apparemment touché de voir chez le branleur qu’était Scott une réaction aussi enfantine. Le copilote avait envie de s’enterrer dans la violence mais puisqu’il avait commencé…
«Je suis dans la merde. Vraiment.»
« Mais non voyons. »
Il lui prit une épaule.
« Continue, tu es sur la bonne voie. Juste...n’en fait pas trop, compris ? »

Scott continua de discuter un peu avec son père adoptif jusqu’à la clore par une bonne accolade. Il décida de rester sur la terrasse, à fumer et boire une bière, jusqu’à ce qu’il ne s’endorme un peu. C’est un cri bestial dans cette nuit silencieuse qui le tira de ses songes. Le copilote resta encore, pensif, avant de prendre la direction des escaliers et de monter à l’étage. Il ne savait pas vraiment l’heure qu’il était mais une envie lui prenait d’aller dans la mauvaise chambre. Une idée un peu dingue mais envoûtante.
Greer se faufila dans la piaule de Pénikett à pas de loup. Il chercha à s’installer dans le siège comme elle l’avait fait, la veille, pour l’accueillir comme il se doit. Le jeune homme observa sa silhouette dans la pénombre. Elle avait l’air de dormir sereinement. Du moins le pensait-il. Est-ce qu’il devait attendre qu’elle se réveille ? Ou pas…
«Tu ronfles.» dit-il en remarquant sa respiration devenir de plus en plus forte.
Quelques instants plus tard, il éleva la voix :
«TU RONFLES !»

Chenoa grogna dans son sommeil. Elle changea même de côté pour se positionner dans l’autre sens, en grommelant un truc comme “ferme-là”, avant de reprendre une respiration plus posée. Manifestement, elle ne s’était pas réveillée plus que ça, habituée à la vie en dortoir.
«Faut que j’te dise...c’est la première fois que je garde quelqu’un aussi longtemps. Ou plutôt...qu’il y en a un qui me supporte aussi longtemps.»
Scott continua de causer. Finalement, ça l’arrangeait qu’elle dorme.
Il avait eu dans l’idée de lui balancer un bibelot sur la couenne, la réveiller dans les règles de l’art du connard. Mais il se trouvait assez gêné comme ça. Greer pinça des lèvres sur une grimace semi-douloureuse avant d’avouer :
«Je m’excuse.»
Ce dernier mot lui arrachait clairement la tronche. C’était bien la première fois qu’il le disait spontanément et sérieusement. Rien que le fait de l’avoir prononcé, il avait l’impression qu’un imposteur lui avait piqué sa gueule pour le dire. Je “M’EX-CU-SE”.
Mais quel Greer dirait ça sans que tout le monde ne rit à la bonne blague sérieux ?
Scott soupira.

La respiration de Chenoa sembla disparaître quelques secondes. Peut-être qu’elle s’était réveillée, et qu’elle avait entendu, ou compris. Mais ce fut de courte durée, car elle se mit à ronfler de plus belle après ce petit moment d’accalmie.
Excédé, Scott leva les bras au ciel avant de les claquer sur ses jambes. Cette fois, il prit un machin qu’il lui envoya sur la tête. Une peluche égarée la petite qui lâcha un long “POUIIIIIC” lors du choc.
«HEY !»
Cette fois, Chenoa se redressa comme une balle dans son lit, dévoilant son pyjama moumouté rouge à petits pois blanc.
« QU’EST CE QUI SE PASSE ??!! ON DOIT ALLER SUR LE PONT ??!! », beugla-t-elle désorientée pour le coup.
«CHUUUUUUUT !!!!» s’alarma Scott en agitant les bras. «On est chez Josh ! Tu vas réveiller la petite !!»
« Ah… ouais…. putain… j’ai failli crever…. ». Elle se frotta les yeux, attendant que la mise au point se fasse. « Qu’est-ce que tu branles dans ma chambre ? », demanda-t-elle finalement en baillant.
«J’suis venu mâter ton pyj. Très sex la mode chez les emplumés...» se moqua-t-il pour repousser l’échéance.
Une voix dans sa tête disait : “Mais putain, qu’est ce que je fous ?!?”.
«Je suis venu...m’excuser.»
MON DIEU !!! Que c’était dur à dire ! Ca faisait encore plus mal que de se bagarrer contre la collègue dans la cuisine de Josh. Il ferma son clapet, tendu comme un arc, en attendant la réaction d’en face. Elle allait se marrer, c’était évident.
Chenoa avait remonté la couverture sur son pyj pour pallier à la critique. Elle savait que ce n’était pas super à la mode mais c’était tellement confortable ! Puis de toute façon, elle n’en avait rien à foutre des critiques de Scott, c’était un point d’honneur qu’elle ne manquait pas de respecter. Elle ramena ses genoux contre sa poitrine en mettant un coussin entre son buste et ses jambes, tout en se callant contre le mur.
« Ah ouais… Putain, tu sais qu’on doit repartir demain ? En moto ? Et qu’il va tomber de la merde maintenant ? », fit-elle avec une certaine forme de sérieux.

En fait...il aurait mieux valu qu’elle rigole.
Scott ouvrit le bec mais rien n’en sortit. Il avait tellement envie de tout envoyer valdinguer, surtout qu’il continuait de se demander ce qu’il foutait là. Pourquoi s’excuserait-il en fin de compte ? C’est elle qui l’avait cherché non ?
«Et puis merde, tiens !» lâcha-t-il en se levant.
«De toute façon c’est pas crédible !»

« Et voilà, il se vexe comme une gonzesse encore une fois. », le railla-t-elle en rigolant. « C’est bon, je t’excuse. Mais pour t’excuser de me présenter tes excuses en pleine nuit en me réveillant, je te serai reconnaissante de le faire dans la journée, hein ? »
«Traite moi encore une fois de gonzesse pour voir !!» renchérit-il, les poings sur les hanches.
«J’en profite. C’est pas demain, dans ta réserve, que j’en aurai l’occasion.»
« Tu aurais pu me le dire demain matin avant de partir aussi. », maugréa-t-elle, tentée de le traiter de gonzesse une nouvelle fois. Mais ce serait bête de lancer une bataille à la con en plein milieu de la nuit.
«Nan, c’est maintenant.» lâcha-t-il de manière autoritaire.
Il rajouta d’une voix plus faible : «Tant que je le peux. Demain, je regretterai !»
Il acquiesça en regardant un point dans l’invisible, comme si son regard pouvait traverser la maison et il se passa une main sur la nuque.
«J’aurai pas dû me battre avec toi. T’as eu le même regard que cette fois où je t’ai descendu de l’échelle d’abordage. Ca fait...trop.»
Scott avait la figure mauvaise, ça lui arrachait les tripes de se livrer comme ça. A croire que c’était effectivement une gonzesse. Cette idée lui tournait dans la tête mais il la rejetta autant que possible. Demain, sur son super bolide, il lui montrerait qui est le MEC. Quitte à marcher en canard deux jours de plus.
«C’était du vent Timber, je te jure. Je m’excuse de t’avoir foutu les foies.»
Chenoa s’était rembrunie quelque peu. Elle préférait le taquiner que d’aller sur ce sujet, mais puisqu’il y venait… Elle laissa flotter un moment de silence avant de répondre. Moment qu’elle s’était permise d’observer pour savoir comment elle allait répondre.
« C’est de ma faute, j’ai voulu faire la maligne avec le couteau… C’était juste pour te foutre la trouille... »
«Pourtant...t’as carrément le droit de m’en vouloir. Tu pourrais faire la fille très sage et changer de partenaire une fois à bord. Si tu me coupes pas les couilles sur le voyage retour, je sais pas encore comment je vais gérer ta famille en plumes...»
« Tu préfères ne pas venir ? », demanda-t-elle de but en blanc. Après tout, elle pouvait comprendre son malaise. Ce ne serait pas une chose aisée de se retrouver dans cet environnement, incognito, avec un passé aussi tumultueux qu’honteux. Il fallait une certaine paires de couilles pour affronter ça. Le fait qu’il se pose des questions était aussi un signe qu’il avait conscience de ce qu’il avait fait, et c’était déjà ça.


«J’ai assez fui.» répondit-il abruptement.
Le copilote laissa quelques secondes en suspens et il décida de se rapprocher un peu de Chenoa. Il s’agenouilla au pied du lit.
«Ils vont me reconnaître non ? Il va se passer quoi à ce moment là ?»
Il haussa des épaules.
«Genre, je me fais peler le crâne pas tous les couillus de la tribu ?»
« Y a pas que les couillus qui peuvent te peler le crâne. », blagua-t-elle avant d’ajouter, plus sérieuse : « Ce n’est pas écrit sur ta gueule que tu étais un violeur d’enfants, sinon je m’en serai rendu compte. »
«Ce que j’veux savoir. C’est s’il y a un truc dans votre culture, un machin - enfin je sais pas quoi - pour se racheter sans y laisser la vie. Je préfère prévoir en te demandant ça entre quatre yeux. »
« Pourquoi tu me demandes ça ? Tu veux dire la vérité devant tout le monde ? »
Il se marra.
«Ouais ! “Eh les emplumés. Alors ! J’ai violé ta gonzesse. Toi aussi là-bas, j’me rappelle. Et toi aussi...mais j’suis pas sûr, j’étais alcoolisé !”» mima-t-il.
Le militaire secoua négativement la tête.
«Je te le demande si je me fais dénoncer. Sinon je cavale...»
Chenoa n’avait pas pensé au fait qu’il pouvait être reconnu. Encore que le risque était faible, mais pas inexistant. Elle haussa des épaules, sans rebondir sur son humour de merde.
« Y a des chances que tu ne t’en sorte pas vivant ouais… Ca dépend. Certains pourraient te livrer à la police de la réserve, d’autres pourraient te faire ta fête… J’en sais rien de comment ça peut se passer... », fit-elle dans un soupir.
«Ok. Tu vas là-bas pour faire la fête, un truc important j’ai cru comprendre. Tu préfères que je ne vienne pas ?»
« J’étais contente de t’emmener. », soupira-t-elle de nouveau, un peu résignée. « Mais ça me ferait chier qu’il t’arrive quelque chose. » Elle avait encore le souvenir de cette fameuse nuit où son frangin lui avait ramené trois scalps encore bien frais, et sanguinolent. Et ils étaient plusieurs comme lui à tirer vers les extrêmes au nom de l’identité amérindienne. « Après, ce serait quand même surprenant qu’on te dénonce ou qu’on te reconnaisse, non ? »
«Carrément. Mais puisqu’on en parle...»
Scott pesa le pour et le contre.
«Je viens. Et si une emplumée hurle dans tout le campement, je me casse. On se retrouvera au centre de liaison, d’acc ?»
« M’ouais. On peut faire comme ça. ». De toute façon, c’était là seule solution vraiment envisageable, avec celle où il ne venait pas du tout. « Si tu n’as pas envie de venir, tu n’es pas obligé non plus. Tu fais comme tu le sens, tu es grand. »
«Bien sûr que j’fais comme je le sens !» attaqua Scott avec un sourire de branleur. «C’est pas parce que tu tiens le manche que tu t’es senti poussé une paire !»
Il se redressa.
«Je viens. Je m’imagine pas te laisser pénarde plus d’une journée de toute façon.»

Chenoa était crevée, lui aussi d’ailleurs.
Scott prit le silence qui retombait comme la fin de leur échange. Quelque part, il appréciait qu’elle ne l’ai pas renvoyé comme une merde. Sans oublier le fait qu’elle avait reconnu avoir merdé de son côté aussi. C’était un poids qui s’envolait, quelque chose qu’il ne reconnaîtrait jamais ouvertement.
«Ok, à demain.» lâcha-t-il en prenant la direction de la porte.
Mais une main sur la poignée, Scott se rendit compte qu’il restait une dernière chose à régler. Il hésita un instant et se lança, préférant regarder droit devant lui :
«Je te brutaliserai plus jamais, je le promets..»
Bon, voilà, c’était dit. Terminé le moment pleurniche et couille molle, l’étape était enfin franchie. Scott pouvait enfin remettre son manteau de connard et faire comme si de rien n’était, comme s’il n’avait pas réveillé Timber au beau milieu de la nuit pour ça. Le jeune homme ponctua sa dernière phrase d’un signe de tête, surtout adressé à lui même, puis il quitta la chambre de Timber.

Cette dernière n’avait poussé qu’un petit grognement d’assentiment. Que pouvait-elle dire de plus au final ? C’était lui qui faisait une promesse, elle ne pouvait pas le forcer à la tenir, comme il pouvait très bien passer outre. L’avenir le dirait. Elle se laissa couler dans les draps qui avaient eu le temps de refroidir, étirant ses grandes jambes sous la couette. Elle eu du mal à retrouver le sommeil, mais finalement, il vint au bout d’une bonne demi-heure.

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Ven 16 Avr - 1:28

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Timber & Cross
Du 04 au 25.02
2020
Bicycle Road Rage

Scott aurait dû dormir plus facilement.
Mais en réalité, ce n’était pas le cas. Des tas de questions lui venait et, même s’il refusait de l’avouer par pure fierté, il balisait à l’idée de suivre son amie. Vraiment, quelle idée de foncer dans ce repère d’emplumés sachant qu’ils n’étaient pas comme Chenoa. Mais c’était une résolution, il allait y aller et trouver de bons moments.
Timber était “contente” de l’y amener malgré ce qu’elle savait à son sujet.
Vraiment… cette gonzesse était étonnante.

C’est sur cette dernière idée qu’il tomba dans un traquenard tendu par le sommeil. Il ne se sentit même pas partir, c’est Josh qui appela du bas de l’escalier en lui rappelant qu’il serait en retard.
C’était comme avoir cligné des yeux. Scott gueula un «OUAIS, OUAIS !» comme un gamin qui espérait repousser l’échéance. Mais c’était tellement dur…
Finalement, il se traîna jusqu’à la douche et se versa de l’eau bouillante pour sortir de sa torpeur. Ensuite, il reprit sa tenue et rejoignit la table où trônait un délicieux déjeuner.
Le petit moment de cette nuit, il l’avait occulté entièrement. Il considéra même Timber comme si rien ne s’était passé et resta silencieux, ne l’ouvrant que pour l’emmerder un peu ou discuter avec Josh. La jeune femme le lui rendait bien, faisant comme si de rien n’était et préférant s’amuser avec Dolie, afin de profiter des derniers instants avec elle.

Après avoir préparé les motos, il y eu des adieux déchirants avec son mentor. Ca lui avait fait un bien fou de le revoir et il devait ce souvenir inoubliable à sa collègue. Elle, elle s’était faite assaillir par la petite Dolie qui lui offrait un dernier dessin raturé à la hâte, que Chenoa glissa dans la poche intérieure de son cuir. Sous leurs regards, Scott et Timber firent ronfler les motos avant d’engager le chemin du retour.

HUIT HEURES PLUS TARD.

Le sentiment d’inconfort était persistant. Piégé de force dans l’inconscience, il n’y avait que cette impression qui le remontait parfois à la surface. Tout était vague, des brumes morcelées de souvenirs qui n’ont pas de sens. Ce n’était pas suffisant pour se rendre vraiment compte de la situation. Sa douleur à l’épaule, il savait que c’était dû à son accident. A cause d’un bouchon monstrueux qui ne laissait même pas la place aux motos, Timber et lui avaient été contraint de sortir de la route.
Ils s’étaient engagés sur des axes inconnus et perdus au milieu des champs interminables jusqu’à ce que l’incident survienne. Un coyote...UN FOUTU COYOTE !!!!...il n’avait rien trouvé de mieux que de se jeter sous ses roues.
Scott n’avait même pas eu le temps de réagir avec la vitesse. Le petit animal s’était fait absorber jusqu’à la fourche dans un bruit affreux de chairs déchiquetées et le copilote avait eu le droit à une gamelle monstrueuse. Sa moto avait glissé de la route jusqu’au bord, l’envoyant valdinguer à sa suite dans un pâturage. Ca avait rameuté les bovins venus se rincer l’oeil, heureux d’avoir un peu d’animation.

Scott n’avait pas grand chose, un miraculé. Mais c’est sa meule qui avait tout pris.
Le coup de la surprise et de la vexation passée, ce qui avait rendu Greer très difficile à vivre durant quelques minutes, ils s’étaient trouvés face à ce constat : la virée s’arrêtait là, aussi brusquement. Puisqu’ils avaient tout de même un certain timing à respecter, Scott s’était fait une raison. Il prévoyait d’atteindre la prochaine grande ville, la mort dans l’âme, pour louer une nouvelle moto. Pouvoir poser son cul sur une selle plus confortable représentait une trop maigre consolation. Mais en bon copilote de F-302, c’était une deuxième nature de résoudre une problématique qui s’opposait au bon déroulement de la “mission”.

Scott ne s’excusa pas, surtout lorsqu’il avait interprété le coup de Coyote vis à vis de la culture de son amie, le traitant de “sale saboteur de merde, tout juste bon à faire fantasmer les emplumés”. C’était la colère. La haine. Quand on perdait sa moto, c’était toujours un drame, un deuil. Une motarde comme Timber pourrait le comprendre.

Oui. La douleur dans son épaule était dûe à tout ça. Mais toutes les autres ?
Dans sa semi-conscience, il se sentait brisé. Comme si un foutu train de marchandise l’avait renversé puis fait passé sous chacune de ses roues, s’assurant par des marches avant et arrières sans cohérence qu’il soit suffisamment réduit en miettes. Scott sentait sa charpente osseuse devenue aussi fragile que du verre tant il avait mal. C’était une volonté inconsciente de recoller les morceaux, les songes en premier, qui le poussait à trouver une explication.

Il y avait ce souvenir d’avoir ri en s’installant dans le dos de Pénikett puisqu’elle n’avait pas le choix que de l’emmener jusqu’à la prochaine grande ville. Il ne s’était pas privé de l’entourer de ses bras pour assurer sa prise en lui murmurant un fameux “Finalement, l’est sympa le coyote”.
Il n’était pas allé plus loin dans les allusion douteuses. Maintenant que Chenoa connaissait son passé, il était obligé de prendre des gants.
Mais ensuite ?

Allez Greer. Un petit effort…
Qu’est-ce qu’il s’est passé pour qu’il se sente aussi mal ?


La station essence. Perdue entre les champs. Si peu visitées qu’elles affichent des enseignes délavées par le temps.
Il s’en souvenait maintenant, la marque complètement méconnue pendait lentement sous l’effet d’une brise légère. Ca le faisait grincer de manière sinistre. Il y avait plusieurs motos garées devant, seul signe de vie, et Scott se souvenait avoir insisté pour y prendre une bière. Il comptait faire couler sa frustration bien au fond de son ventre pour la digérer. Accessoirement, il jouait le gros bâtard en laissant l’indienne faire le plein de sa bécane le temps qu’il fasse un tour.
L’emmerder en faisant son connard avait ce petit côté exutoire presque délicieux.

La bière en main et l’épaule toujours douloureuse. (Le cul profondément rapé mais ça il ne l’avouait pas). Scott avait quitté la structure en bois branlante pour s’enfoncer dans ce qui ressemblait à un cimetière de bagnoles. Le genre que l’on aperçoit quand le proprio trouve intelligent de faire de la vente de pièces détachées dans un coin aussi paumé. Scott tiqua quand même au bout d’un moment. Quand certaines bagnoles étaient plutôt récentes, avec un sandwich qu’on avait laissé moisir là. Ou bien ces impacts de balles au travers du siège conducteur dont la marque brune desséchée ne laissait pas de doute quant au peu d’avenir de son propriétaire.
L’inquiétude avait tout juste commencé à l’investir qu’il avait entendu le bruit particulier de la Harley de son amie. Scott était sortit prestement du cimetière, se disant qu’elle se barrait pour se venger et qu’elle ferait juste une longueur avant de revenir le chercher. Sauf qu’en apercevant la Harley s’envoler, ce n’était pas Pénikett dessus… mais un autre mec.

Oui...c’est à ce moment là qu’il avait senti le vent tourner.
En revenant dans le chalet, la vieille qui tenait la caisse avait l’air soudainement moins amicale. Elle avait viré tout le contenu du portefeuille de son amie sur le comptoir pour en faire le tri. Et Timber était plus loin dans le fond, un gros tas lui enlaçant les épaules d’un air presque romantique. Les tatouages de taulards sur sa tronche racontaient une autre histoire. La simple passivité de Timber contrastait énormément avec sa grande gamelle. Le genre de truc qui n’était carrément pas naturel. Rien que ce signe ne présageait rien de bon.

Oui. Ca y est. Tout lui revenait maintenant.
Scott s’était placé devant Chenoa et le gros tas, la bière dans la main. Il était resté silencieux, bien conscient que son amie avait des problèmes et qu’elle n’aurait jamais laissé personne lui piquer sa tire, quitte à se prendre un pain. Il se passait quelque chose de grave, ça couvait lentement mais sûrement. C’était un traquenard… ils étaient tombés dans un piège. Quelques mouvements peu surprenants avaient fait apparaître les motards restant depuis les rayonnages attenants.
On l’entourait.

«Il est mignon ton nouveau copain.» s’était moqué Scott en brandissant sa bière vers elle, comme s’il saluait sa “chance”. C’était sans réel enthousiasme. Plus pour la forme, essayer de la déstresser, et de se déstresser par la même occasion. Ils étaient parti pour le tourniquet. La moulinette ! Alors il fit les premiers pas pour raconter au bonhomme sa vision des choses, ce à quoi il répondit d’un morceau de métal cylindrique pointé sur le flanc de son amie.
Voilà pourquoi elle ne bougeait pas, c’était rien de moins qu’un canon scié qu’on lui avait collé sous le nez. Triple graisse lui donna un ordre en espagnol tandis qu’on l’entourait un peu plus. Ca lui déclencha une bouffée de haine.

Des Mexicains…
Il détestait les Mexicains…
Ca sentait le gang à plein nez.
Et prendre Timber en otage...

«Cette gonze est à moi !» avait-il lâché avec une arrogance à faire pâlir un mort. Entre connards criminels, Scott marquait son territoire comme un clébard et il en faisait le fier : «Allez traîner vos bites ailleurs !!!»
Forcément, il ne faisait peur à personne, ce qui rajouta à son agressivité. Il était mauvais, il voulait tous les buter sans états d’âme.

La partie la plus sombre de Scott émergea doucement. Pour le meilleur et pour le pire, c’était de ça qu’il avait besoin. Le criminel. L’ordure. Il avait la trouille parce qu’il comprenait parfaitement la situation, c’était du sérieux. Ce serait pas une simple petite bagarre entre motards avinés, une rixe à la con dans une station service paumée. C’était vachement plus grave. Ils étaient dans une merde noire là. Ces mecs avaient dans l’idée de se payer de la chair fraiche et le duo s’était arrêté au mauvais endroit, au mauvais moment.
C’était fatal…

Il avait attendu que triple gras ouvre sa gueule. Scott le matait longuement, l’air mauvais, assassin, le regard chargé d’une lueur de haine bestiale. Il en avait le crâne qui fumait. Dès que le gros dévia son attention hors de la gâchette pour prononcer les premiers mots, Scott lui envoya sa bière dans la gueule. Bien visé pour une fois, en plein dans le pif, rendant un semblant de liberté à sa collègue dans un “poc” bien sentit.
Scott se souvenait lui avoir hurlé de se battre. Et il ne se souvenait pas de l’avoir revu ensuite.
Ca avait été une baston sauvage et sanguinaire. Il avait eu le dessus au début.
Greer était un opportuniste, un petit vicelard. Il s’était servi du contenu des rayonnages pour entraver la progression de ces cons là, former comme une sorte de goulot. Il avait eu le temps d’en coller une ou deux avant de sentir le vent tourner salement en sa défaveur. La panique le poussait à sortir son couteau et il saigna le prochain connard. Un coup simple dans le buffet, pleine poitrine, un SHPACK brutal de l’acier qui pénètre la chair.
Mais après...il avait bien vite déchanté. Le corps du mourant avait emporté son arme dans la chute.
On ne surpasse pas le réalisme. A trois contre un, le résultat du match est joué d’avance.
Il s’était fait défoncer la gueule. Puis black out...

Bon, voilà, il avait la réponse.
Il avait la cervelle en marmelade et le corps martelé. Ces mecs lui avait roulé dessus sans qu’il ne parvienne à reprendre le dessus. Maintenant qu’il comprenait dans quelle situation de merde il se trouvait, Scott se forçait à ouvrir les yeux. Les sursauts soudains et le bruit du moteur lui prouva qu’il était allongé dans la remorque d’un truck. On lui avait collé un casque de moto sur la tête dont la visière avait été bourrée de chatterton.
Il eut un premier accès de panique avant de se faire violence pour l’enterrer au plus profond de lui. Il ne voulait pas offrir ce plaisir à ses ravisseurs. Il y avait forcément quelques connards armés pour les surveiller. Dans la visière obstruée, Greer trouva une minuscule faille, un tout petit filet de lumière depuis lequel il essayait de discerner quelque chose. C’était surtout le bruit de sa respiration qu’il percevait. Et un environnement qui défilait vite.
On les emmenait quelque part…

Aussi discrètement que possible, il tâtonna de ses mains entravées à la recherche de son amie. Il ne tarda pas à reconnaître, selon lui du moins, le cuir de sa tenue et ses longues cannes qui faisaient sa grandeur. Il ne savait pas trop ce qu’il tripotait et peu importe, tant qu’il longeait son corps pour trouvait sa main ou son poignet. Elle s’était battue aussi, non ? Ou est-ce qu’elle était restée pétrifiée d’effroi ?
Scott trouva finalement son poignet qu’il serra d’un geste pour lui faire comprendre qu’il était là. Et que le jeu n’était pas fini.
Non… au contraire, ça commençait.
Ils avaient mis la main sur les MAUVAIS otages, foi de PéniGreer !

«Chenoa ?» tenta-t-il finalement, la voix rauque, éraillée par la douleur.
Il douillait salement.
Scott toussa pour se dégager les bronches puis secoua ce qu’il tenait d’elle, reprenant un peu plus fort pour traverser le casque.
«Chenoa ?»

Une botte, du moins le croyait-il, s’enfonça dans ses reins, lui arrachant un cri bien malgré lui.

«Callate ! Bastardo !»
«NO HABLA TU LANGUA, sale enculeur de chèvres !»

Il s’en reprit une couche.

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Ven 16 Avr - 23:43

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Timber & Cross
Du 04 au 25.02
2020
Bicycle Road Rage

Le type qui hurle, puis la voix étouffée de Scott acheva de tirer Chenoa de sa torpeur. Elle était percluse de douleur… Revenant progressivement à la conscience, la jeune femme commençait à se souvenir de la position délicate dans laquelle elle se trouvait. Elle ne pouvait pas en vouloir à Scott, il n’aurait pas pu deviner que ça se terminerait comme ça. Ils ne devaient que faire le plein, et étancher la soif de son copilote, et poursuivre leur route pour trouver une moto de remplacement.

Ils ne devaient pas tomber dans un piège.

Ça aurait pu être des Hells Angels, ou des Bandidos, mais ils s’agissaient de Mexicains. Ce qui n’était pas pire ou mieux en réalité. Et peut-être que ces gaziers étaient affiliés à ce genre de club de motards criminels : les 1% comme on les appelait outre Atlantique. Quoiqu’il en soit, ils étaient dans la merde. Elle l’avait senti en entrant dans la boutique quand elle avait voulu régler le plein d’essence.

« On n’prend pas la carte. »
« Ah ok ! J’ai des espèces. », se souvenait avoir répondu Chenoa en affichant un sourire habituel. Elle avait choisi de ne pas calculer le loubard qui était accoudé près de la caisse.
« Pas d’espèces non plus... »
« Euh…. d’accord. ». Elle avait pris un billet de cent dans ses doigts, avait tiré dessus pour le faire claquer en ajoutant : « Allez Madame, vous n’allez pas m’dire que vous êtes contre Benjamin ? », avait-elle fait avec une certaine forme d’humour en plaisantant, pensant qu’elle lui faisait une farce. D’autant que sur l’instant, Chenoa ne voyait pas comment elle pouvait régler autrement son plein de moto…
« Ni Benjamin, ni George, ni Thomas, ni Abraham, et encore moins Mastercard, American Express, ou encore VISA. »
« Du coup c’est gratos ? C’est quoi l’embrouil... ». Elle n’avait pas fini sa phrase que le gars accoudé au comptoir avait posé un canon scié sur le plan.

« Pas d’embrouille chica. J’ai payé pour toi. »
« Ah ? Et ben… C’est gentil, fallait pas. Je vais y aller maintenant… Bonne journée. »
« Hey amiga, je règle ta dette et tu te tires comme ça ? »
« J’vous ai rien demandé, amigo. »

Il avait levé son calibre, pour plaquer l’extrémité du canon sur le front de l’amérindienne.
« Gracias. », avait-il dit en prenant les clés de la Harley dans les mains de la militaire. Il les balança à un acolyte dans son dos. Quelques secondes après, elle entendait sa moto se barrer. Sans elle.
La vieille était en train de se réconcilier avec Benjamin et tous les autres, s’empressant de foutre le liquide dans son tiroir caisse. Tout ce qui était carte de crédit et d’identité, elle ne toucha pas. Pas folle la vieille.

Elle n’opposa pas de résistance quand il la tira vers lui pour enrouler son bras autour de son épaule et l'entraîner vers le fond du chalet, alors que la porte s’ouvrait sur Scott. Forcément, elle lui fit les gros yeux, mais comment pouvait-il s’en apercevoir à cette distance ? Le mieux était qu’il comprenne tout de suite la situation et qu’il se tire pour appeler les secours. Mais les potes du loubards étaient déjà sur le coup, et rapidement, ils entourèrent Scott. Ca sentait la merde à plein nez.
Scott rajoutait de l’huile sur le feu. Décidément, la diplomatie et la discussion, ce n’étaient pas son fort. Tout dégénéra en un instant. Le type qui la tenait avait pris la bière dans la gueule. Chenoa n’avait pas attendu que Scott lui hurle de se battre pour casser la bouteille de Gin Martini, qu’elle avait pris dans le rayon, sur le crâne du truand. Le verre éclata, lui entaillant méchamment le cuir chevelu. Désinfection rapide par l’alcool ! Il hurla de douleur.

Faut jamais mélanger les alcools mon gars, ça fait mal à la tête !

Sauf que manifestement, il avait de l’expérience dans la castagne. Alors que Chenoa le voyait se relever, elle avait pris une nouvelle bouteille, se trouvant stupide d’avoir lâché le tesson de verre au moment de l’impact, mais elle n’eut pas le temps de l’abattre proprement qu’elle se faisait plaquer au niveau du ventre par ce boeuf. Même un joueur de foot américain se serait plié en deux face à ce coup d’épaule monstrueux. Elle sentit la bouteille rebondir mollement sur le dos du mec alors qu’elle sentait son propre dos heurter le rayonnage derrière elle. Dans un bruit dantesque, elle se retrouva par terre, la respiration coupée, au milieu de débris de verre en tout genre, et du rayon effondré. L’autre lui colla une baffe magistrale, avant de la saisir par les cheveux, de la forcer à se lever, et de la jeter par dessus le comptoir. Sa cuisse heurta le plan de travail, embarquant le tiroir caisse avec fracas, et elle se retrouva les quatre fers en l’air dans le rayon “cigarettes”, avant de retomber au sol lourdement, sur le dos. Très franchement, elle ne savait plus où elle habitait alors que des paquets de clopes tombaient autour d’elle à sa suite. Elle vit la carabine fixée sous le comptoir. Alors qu’elle tentait de l’attraper, la botte de la vieille avait fini de l’achever en s’écrasant sur son visage.

Trou noir ensuite.

Elle était maintenant réveillée. Elle était certaine que Scott était avec elle. Ca devait être lui qui avait essayé de la sortir de sa torpeur et qui était en train de se faire dérouiller. Les mouvements étaient ceux d’un véhicule qui circulait, et le bruit, atténué par le casque qu’elle avait sur les oreilles, semblait provenir d’un camion. Ainsi donc, ils étaient transportés. Cela n’augurait rien de bon. La visière était obstruée, rendant les choses encore plus compliquées. Elle n’était pas claustro, mais là, elle devait reconnaître que c’était angoissant. Elle rua dans les brancards, ligotées comme une saucisse ou presque. Elle avait au moins les mains entravées. Un des ravisseurs tenta de la calmer en la tenant, mais en se débattant, elle lui balança un coup de botte dans les roustons, sans faire vraiment exprès même si elle aurait probablement visé cet endroit si elle avait pu voir. Le gars poussa un gémissement de douleur en se tenant les burnes, tandis que son collègue se foutait de sa gueule grassement.

« Ella me dio una patada en los huevos. », couinait-il plié en deux sur le plancher du camion. Au moins, il n’avait pas dérouillé Scott gratuitement. Le copilote avait dû déduire qu’un des connards avaient fait les frais d’être trop près de Timber et il éclata d’un rire sadique. Du genre “bien fait, branleurs !!”
« Suffit ! », fit l’autre en donnant une grosse claque dans son casque pour qu’elle se calme. Il s’était bien marré en voyant son collègue se faire déglinguer les burnes, mais il ne pouvait pas la laisser se débattre comme ça impunément.

Malgré le casque, le choc la propulsa sur le côté, où elle retomba contre Scott. Elle sentit son propre casque toucher le sien. Ca ne servait à rien de lutter dans ces conditions. Autant garder des forces. Elle trouva la main de son ami et elle la lui serra en guise d’encouragement. Elle le tenait aussi fortement qu’elle le pouvait, pour l’empêcher de faire le con à nouveau. Ca ne servait à rien pour l’instant. Ce contact, Scott l’interpréta de cette façon et il lui en fût infiniment reconnaissant. Comme cette fois où il avait été décroché d’EagleStar et qu’il s’était retrouvé en perdition dans le vide, ça lui faisait perdre les pédales. Il noyait sa panique dans une haine sans limite et il gesticulait, tempêtait, inutilement. Il avait été au bord de la rupture quand il avait reçu ce message de la part de la pilote.
Finalement, c’était elle qui paniquait le moins et qui le gardait tranquille.

Le camion s’arrêta au bout de quelques minutes. Le bruit de la porte arrière qu’on ouvre se fit entendre. On les força à se mettre debout, puis on les guida pour les descendre. Il ne faisait pas chaud, et malgré le Scotch sur sa visière, Chenoa comprit qu’il ne faisait plus jour.

« Adelantado !! », beugla le type derrière eux en les poussant dans le dos ! “Avance !”
Chenoa avait envie de le traiter de connard de merde, de raclure de fils de pute, de sale enculeur de chèvre, de mangeur de piment dégénéré, mais elle se retint, serrant les dents. On l’installa sur une chaise et on lui enleva le casque sans douceur, lui provoquant une certaine douleur dans le nez. Elle cligna des yeux. Ils étaient dans une petite pièce sombre, ou une ampoule solitaire au plafond diffusait une lumière blafarde, maladive. Tout de suite, on lui colla un morceau d’adhésif sur la bouche. Même traitement pour son copilote qui avait amorcé le début d’une insulte inachevée. On lui balança un taquet derrière le crâne.

« Militares. », fit l’homme en agitant des cartes, certainement trouvées dans leur portefeuille.
« Parfait…. des candidats de choix. Vous les avez pêché où ? »
« En Jeene. »
« Un trésor cette Jeene. Je ne manquerai pas de passer la remercier. »

Les deux hommes se tournèrent vers les deux captifs. Il y avait un des Mexicains, et un type en costume rayé, qui tirait sur un cigare. Il les considéra un instant.

« Ils sont amochés. »
« Si, pero las estaban luchando. »
« Des battants. ». Un sourire illumina ses traits.

Il approcha de Chenoa et lui caressa la tête. Elle tenta de s’écarter, mais en vain.
ZONE ROUGE !!! Greer se redressa illico en embarquant la chaise avec lui. Ca gueulait de l’espagnol avec une main lui intimant l’ordre de se rassoir illico. Mais le copilote fixa l’inconnu d’un air meurtrier en beuglant :
«MMMFFF- MF MF MF - MFFFHHHHGHHHHH ! MGGGGFHHHH !»
Le Mexicain voyant qu’il n’arrivait pas à le faire asseoir, lui colla un coup de poing dans le foie pour le plier en deux et le calmer. Manoeuvre efficace et sans appel. Greer retrouva sa place la seconde d’après. L’autre, en costume rayé, n’avait pas bougé d’un pouce, la main bien à plat sur les cheveux noirs de l’amérindienne qui avait les yeux exorbités.



Il passa ensuite dans leur dos, tout en conservant une main sur le crâne de la jeune femme.
« Gardez vos forces… Demain… demain, vous allez vous battre… ». Il murmurait à leurs oreilles respectives. « Vous battre oui. Contre une petite famille, un homme, une femme, un mari et une épouse, qui… s’ils ne vous tuent pas, perdront leur gosse chéri. ».

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Jeu 13 Mai - 13:58

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Timber & Cross
Du 04 au 25.02
2020
Bicycle Road Rage

Scott baissa la tête. Une arène ? Une putain d’arène clandestine ?!?
Son regard migra forcément vers Timber. Est-ce qu’elle aurait la force de faire un truc pareil ? Lui savait qu’il n’était pas aussi compatissant s’il pouvait sortir l’indienne de cette merde, quitte à flinguer de l’innocent. Quitte à le payer psychologiquement plus tard. Mais c’était la colère et la haine qui le tenait. Quand ça allait redescendre, il ferait tellement moins le cador...
Le bourreau se redressa et repassa devant eux, un sourire mauvais sur le visage. Il leur fit un clin d’oeil, et se dirigea vers la sortie. Le gras double, ou triple, entra à son tour. Il balança du pain et déposa une gourde sur le sol. Puis il balança un vieux couteau ébréché à côté de la bouffe et de l’eau.

« Bon app les amoureux. J’ai parié sur vous, alors faites pas les cons demain. C’est pour ça que vous avez ce petit supplément. », dit-il en baissant la voix sur la fin. Il regarda vers la porte, n’entendit rien, et déposa un bout de viande sur le pain ainsi que deux analgésiques.
Il sortit de nouveau, et on entendit clairement le bruit d’un verrou qu’on enclenchait. Il n’y avait plus qu’à se détacher…

Sur le coup, Scott avait grogné comme une bête en réponse. Une vague d’émotions contradictoire le malmenait. Ils avaient au moins un allié dans ce bourbier par un simple intérêt pécunier, c’était mieux que rien. La peste plutôt que le choléra. Manger, boire et se soigner, ils ne pouvaient pas cracher dessus, surtout si on les jetait dans une fosse le lendemain. Le copilote resta sur son siège jusqu’à ce que le verrou ne s’enclenche. Le silence était retombé d’un coup, comme la vérité assassine de leur situation merdique. Etait-il rassuré d’être seul et dans une relative sécurité pour l’instant ? Ou devait-il se laisser aller à la chute brutale d’émotions qu’il ressentit à ce moment là ?
Scott se leva de son siège. Le coup qu’il avait reçu dans le bide le tordait encore un peu de douleur, ça lui arracha une plainte alors qu’il progressait vers le couteau. Mais au moment où il arrivait dessus, il remarqua des sanglots qui s’élevaient dans son dos. L’homme se retourna lentement puis détailla son amie. Elle était affalée sur son siège, tremblotante, et en pleurs. Ca lui fendit carrément le coeur. Même en sa qualité d’ex-pourriture, on ne pouvait pas être insensible face à cette scène de détresse. La peine de Timber était si sincère et légitime que ça l’affectait beaucoup.

Des gonzesses, il y en avait un bon tas capable de chialouser pour une moitié d’ongle cassé. Mais Timber n’était pas de ce bois là. C’était la grande gueule battante qui s’amusait à gagner le concours de “celui qui a la plus Grosse”. Quand on connaissait la jeune femme pleine de vie et d’enthousiasme, son état avait de quoi faire fondre n’importe qui.

Il s’en voulait.
Il s’en voulait terriblement.
Timber avait simplement projeté de faire la fête dans sa réserve des Windows Rocks. Elle n’avait rien demandé à personne. Par curiosité, elle l’avait suivi jusqu’ici, heureuse de s’embarquer dans un Road Trip sur la moto de sa jeunesse. Scott avait pris un certain plaisir à lui faire la surprise, une forme de compensation pour ce qu’elle apprendrait chez Bradford. Mais il n’aurait jamais pensé que cela la ferait aboutir sur cette chaise, les nerfs brisés, le visage en larmes.

«MMMFFF ! MGGGGFHHHH !» fît Scott pour attirer son attention.

Timber était une sacrée fille, une acharnée quand elle s’y mettait. Elle le lui avait prouvé dans son cockpit de F-302. Ils étaient revenu vivant du cinquième vol, ce n’était pas pour finir comme ça dans ce taudis misérable !
Elle ne s’était pas laissé faire, que ce soit dans la station service comme dans le camion, Chenoa restait solide. Pas de doute qu’elle allait remonter la pente. Mais là, ce n’était pas le moment, Scott prenait conscience qu’elle avait assurément plus besoin d’une épaule pour encaisser le coup que d’un connard qui s’évertue à couper ses liens le premier.
Greer choisit d’abandonner le couteau. Il aligna quelques enjambées pour arriver jusqu’à elle et il se contorsionna pour lui offrir son épaule. Il chercha à caler cette tête fiévreuse contre lui, refermant le geste de sa joue. Le contact qu’il partagea n’était pas à sens unique, ça lui fit un bien fou. De la chaleur humaine, de la simple présence. Ils se retrouvaient ensemble contre l’adversité. Pas seuls et isolés. Ensemble. La meilleure putain d’équipe des F-302 ! Ils allaient faire payer cette bande de rats ! Il inspira longuement tout en fermant les yeux, ça allait s’arranger, il n’y avait pas de raison que ça ne soit pas le cas.
Sur le temps qu’il prit à offrir son épaule à son équipière, Scott se fit la promesse qu’il ne la laisserait pas finir comme ça. Si l’un d’entre eux ne devait pas remonter dans la cabine d’un F-302, ce serait lui. Pas par héroïsme. Ni fierté sexiste. Elle le motivait par sa simple présence. Chenoa “Timber” Pénikett retournerait sur le Dédale !

Il ne pouvait pas la serrer dans ses bras pour lui promettre de la tirer de cet endroit, les mexicains leurs avaient coupé les entraves pour leurs lier les mains dans le dos. Scott en était rendu à fléchir les genoux, penché de moitié, pour la consoler avec des «Mmmm...mmmm...» qu’il espérait rassurant.
Quand il sentit les sanglots de son amie se tarir et sa force d’âme reprendre le dessus, Greer se décolla pour la fixer dans les yeux. Il chercha le retour de sa vaillance et la découvrit de nouveau. Comme une résolution, cet éclat lumineux qu’elle avait dans les yeux quand elle n’en démordait pas. Qu’il poussait la gueulante pour lui faire lâcher l’affaire et qu’elle embrayait aussi sec, dans la surenchère, et qu’elle se montrait plus butée encore. Ou comme lorsqu’elle bloquait toute la file, à la cantoche, en refusant la portion supplémentaire que Goose lui foutait dans l’assiette en la traitant d’anorexique. C’était ça...
Voilà. L’émotion passée, elle était de retour sa pilote ! Il hocha la tête de concert avec elle et lui fit signe de venir. Impossible de se libérer les mains sans son aide.

Chenoa était forcément inquiète par cette situation, elle était même terrorisée. Elle avait tenu bon, dans la résistance et la rébellion, jusqu’au moment où ce mec avait posé sa main sur sa tête. Elle avait senti son coeur s’accélérer, sa respiration s’amplifier, d’autant plus qu’elle était bâillonnée et entravée. Autant dire qu’elle ne pouvait pas se défendre, qu’elle était à la merci de cet homme, et quelque part, elle savait qu’il était possible qu’elle ne soit captive que dans un seul but : celui de profiter d’elle.
Cette main venait de lui rappeler ô combien elle était vulnérable et exposée, ô combien il serait simple pour ce type de lui faire subir une contrainte qu’elle avait déjà dû subir plus jeune. Trop jeune.
Elle était parvenue à se contenir jusqu’à ce qu’il parte. Une fois seule, l’émotion, la terreur, l’appréhension, mais surtout l’anticipation, tout cela était venu percuter le rempart qu’elle avait érigé pour ne pas paraître trop faible. Elle pensait qu’il suffisait de se faire une raison, de laisser passer l’orage, de sortir de son corps, et de laisser faire, mais en réalité, toutes les fibres de son coeur hurlaient qu’il n’était pas question que cela se reproduise. C’était injuste. Pas elle. Pas une nouvelle fois. N’importe qui, mais pas elle.
C’était lâche. Elle le savait. Et elle s’en voulait.

Le soulagement de savoir qu’elle n’était là que pour se battre contre des gens était tellement grand qu’elle s’en voulue tout autant. Ce n’était que “ça”. Elle pleurait de soulagement, de soulagement qu’il soit parti, de soulagement de savoir qu’elle ne serait pas un morceau de viande pour ce soir. Scott manifesta sa présence en revenant vers elle. Elle n’avait pas spécialement honte de pleurer, elle n’était pas tellement du genre à cacher ses émotions habituellement. Le contact de Scott était rassurant. Ils étaient tous les deux dans la même galère, et c’était un plus. C’était un plus parce qu’ils étaient une équipe habituellement, et qu’ils avaient l’habitude de fonctionner ensemble. Le temps fila pendant quelques secondes, et elle se calma. Elle devait reprendre du poil de la bête et saisir des occasions pour se tirer de là. Pour faire tomber ces pourris.

S’ils vivaient assez longtemps, s’ils survivaient assez longtemps, le commandement s’inquièterait de leur sort. Ils seraient localisés par la puce sous cutanée qu’ils portaient, et retrouvés. S’ils étaient morts aussi d’ailleurs. Le SGC ne laisserait pas traîner dans la nature deux cadavres porteurs de cette technologie de toute façon. Au moins, s’ils ne vivaient pas assez longtemps pour être récupéré, Chenoa pouvait se consoler en se disant que l’armée ferait le ménage dans ce trafic d’être humain.

Timber opina du chef quand Scott chercha à savoir si ça allait mieux. Ouais, elle était déterminée à survivre, elle était déterminée à se battre. Le coup de mou n’était plus qu’un mauvais souvenir, un mauvais souvenir de son passé, un mauvais souvenir de ce traumatisme qu’elle pensait cicatrisé depuis longtemps. La cabine de son F-302 lui manquait atrocement. C’était décidée, elle ne prendrait plus de vacances !
Chenoa se redressa sur ses jambes, pliée en deux pour embarquer la chaise. En collaborant tous les deux, ils allaient parvenir à se libérer avec le canif que l’autre truand avait laissé sur le sol. Il pouvait faire preuve d’une certaine “sympathie” du fait de son pari, la jeune femme ne se faisait pas d’illusion. A la moindre occasion, il s’occuperait de son cas, que ce soit pour la tuer ou pour la violer. Ou les deux. Dans l’ordre de son choix. Elle ne voyait pas comment s’en sortir pour le moment, mais si déjà elle pouvait se libérer de ses entraves, ce serait un plus. Un plus vers la liberté. Par contre, elle ne comptait pas boire ni manger. Il ne fallait pas déconner.

Elle se laissa couler par terre. Elle était moins courbaturée que Scott, pour la bonne et simple raison qu’elle n’avait pas pris une gamelle en moto, elle. Du coup, elle estimait qu’elle était plus “fraîche”. Elle attendit que Scott lui pousse le couteau dans les mains, et elle le récupéra fermement avant de se redresser et de s’asseoir de nouveau. Maintenant qu’elle le tenait bien, elle essaya de cisailler ses liens, mais elle n’avait pas le débattement suffisant pour le faire. Elle allait donc devoir tenir la lame émoussée et patienter en attendant que Scott fasse coulisser ses liens sur la lame jusqu’à ce qu’ils rompent. Un peu de patience et ce serait bon !

Il ne lui dirait jamais. Mais si Chenoa n’avait pas été là, qu’elle n’était pas quelqu’un qui valait le coup de sortir de cette merde, il aurait sûrement fini par péter un boulon. Pire qu’un claustrophobe, c’est le type que tu enfermes sans qu’il ne le veuille.
Ses passages en taule sur le Dédale, c’était mérité. Même pour cette garce de Lay’s. On ne transige pas avec la règle. Le recul était dur à avoir mais Scott, en fin de compte, comprenait. Une part de lui l’acceptait. Il savait qu’il réussirait à se démerder pour remonter dans son cockpit et prouver qu’il méritait sa place. Par contre !!! Finir enfermé comme du bétail chez les Mexicains du coin, ça le mettait hors de lui. Il y avait cette réalité que tout pouvait s’arrêter, qu’il ne reverrait ni le Dédale, ni EagleStar. Ni même les copains de l’escadrille.
Ca lui était inacceptable. Survivre au Cinquième Vol, survivre à la sélection très pointilleuse. Tout ça pour terminer dans ce ramassis d’ordures attardées.

A force de se secouer comme un con, Cross parvint à sectionner ses liens. Il ramena ses mains à lui en poussant un grand soupir de soulagement et examina ses poignets. Quelques entailles ici et là sans gravité. Des écorchures plus dérangeantes qu’autre chose. D’un geste prompt, il s’arracha le scotch qu’il avait sur la tronche et vira la chaise, ce symbole de leur détention.

«Attends !» fit-il en lui prenant le couteau.

Il posa une main sur son épaule, puis, tout en passant soigneusement la pointe dans un endroit libre des entraves pour les couper, il lui murmura à l’oreille :
«Ce serait à la maison qu’on t’aurait saucissonné comme ça, j’aurai tellement ri !»
Il attaqua les liens en faisant attention de ne pas la blesser.
«J’m’entends déjà te balancer : “Alors Timber, on l’entends moins ta grande gueule, hein ?!?”»
L’homme ria doucement de sa propre connerie.
Scott termina de découper le tout puis s’éloigna de quelques pas pour se rendre au niveau de la porte.
Il tourna alors comme un lion en cage, cherchant vainement une faille, une issue, quelque chose. Mais de toute évidence, ces types-là n’étaient pas des débutants. Et ils avaient visiblement bien fait les choses. Il commençait sérieusement à accuser le coup physiquement. Sa gamelle Dans sa recherche frénétique, il finit par s’attarder sur le faciès de son amie.
Il n’y avait pas de doute sur le fait qu’elle s’était battue. Ou qu’elle avait bien mangé dans sa défense. Une grosse boursouflure avait germé sur sa pommette violacée, signe qu’un épanchement sanguin s’était fait de l’intérieur. La pression augmentait en déclenchant une bonne brûlure.
Il y avait une manière simple d’arrêter ça. Tout bon bagarreur comme Scott savait si prendre.

«Eh.»
Il s’approcha d’elle et examina sa blessure.
«Va falloir qu’on s’occupe de ce que tu as au visage, Timber. T’as pris un sale coup...»

Déjà, la sensation de légèreté de ne plus avoir les mains entravées était une petite victoire en soi. Chenoa apprécia de faire rouler ses poignets pour les détendre, et de pouvoir s’étirer un peu. Pouvoir respirer par la bouche était aussi un luxe qu’elle ne se refusa pas. Cette petite pause dans l’horreur lui permet de relativiser quelque peu et de ne pas trop accuser le coup. Au contraire, cela lui redonna un peu de baume au coeur. Maintenant qu’ils étaient libres de leur mouvement dans leur prison, il y avait une plus grande probabilité qu’ils puissent se tirer de là. Tout était une question de statistiques, et de chance. La mathématicienne en elle ne pouvait que se féliciter de ce regain de point dans le pourcentage total menant à la grande évasion.

Même si ce n’était pas folichon folichon encore.

Ces Mexicano de merde n’avaient qu’à bien se tenir. L’univers avait essayé de les tuer, et ils lui avaient dit un gros “merde”. Pareil pour les Wraiths. Ce n’étaient pas ces gringos qui allaient avoir la palme de les buter.
Fidèle à lui-même, Scott s’était précipité pour essayer de trouver une ouverture. Elle ne pouvait pas l’en blâmer. S’il ne l’avait pas fait, elle l’aurait fait, même si au fond, elle savait que rien n’avait été laissé au hasard dans cette entreprise frauduleuse de traite d’humain. Se battre pour sa survie contre d’autres personnes ne l’enchantait guère, mais elle préférait ça que de servir de dernière poupée gonflable à la mode.

Ah si seulement ils pouvaient prévenir l’USAF. Cette affaire serait réglée en deux trois mouvements. Il y avait deux possibilités : soit ils prévenaient les forces régulières de l’ordre, soit ils débarquaient eux-même contre toute forme de juridiction. Le premier choix serait certainement celui approuvé, peut-être en ayant soustrait les deux militaires de là via le Dédale. Enfin qu’importe, l’idée de les envoyer servir de repas aux Wraiths ne déplaisaient pas à Timber.
Scott revint vers elle, chassant ses mauvaises pensées qui n’étaient pas digne de son esprit, mais qui étaient parfaitement humaines.

« T’inquiète, ça finira par passer… De toute façon, nous sommes partis pour nous prendre des mandales dans la gueule les prochains jours. Alors bon... »

Chenoa se leva. Elle avait besoin de faire aller ses grandes jambes courbaturées. Elle sentit immédiatement une faiblesse dans sa cuisse… Comme si elle était dure comme un bout de bois. Ce n’était guère étonnant, quand on savait qu’elle avait heurté avec violence le guichet de la station essence. Marcher permettrait de délier un peu cette contracture qu’elle ne sentait que maintenant. Elle n’osait même pas descendre son pantalon pour observer les dégâts, certaine d’y trouver un bleu énorme aux couleurs bien dégueulasses.

« J’suis d’avis de tenter de nous barrer de là dès qu’ils ouvrent cette putain de porte… Faudrait trouver quelque chose qui provoque la surprise chez eux, qu’ils se précipitent dans la pièce sans trop faire attention, et qu’on leur tombe dessus par derrière... »

Accrocher son cerveau sur une stratégie, c’était le meilleur moyen de ne pas penser à sa situation désespérée. Discuter avec Scott, échanger, combattre ensemble, elle avait l’habitude. Ils formaient une bonne équipe de bras cassés qui savaient toujours revenir au bercail. Elle se raccrochait à cet espoir !

Malgré une inspection minutieuse, ils ne trouvèrent rien pour tenter une évasion. La porte est fermement fermée. Sans fenêtre, les murs, bien qu’en bois, offraient une résistance suffisante pour les maintenir confiné. Par orgueil, par dépit, par rage, Chenoa faisait l’impasse sur l’eau, la bouffe et les médocs. Elle avait peur que quelque chose ait été mis dans la première, que la seconde soit empoisonnée, et que le troisième soit en fait une pilule d'ecstasy ou une merde dans ce genre là. Néanmoins, Scott décida de taper dans le repas. Il ne parlait pas, se contentant d’un échange de regard à l’adresse de son amie. Il déchira un large morceau de pain qu’il plaça dans sa bouche et mâcha sans le moindre appétit. Son regard était défiant, dénué de crainte et d’angoisse, le temps que le contenu descende le long de son oesophage et atterrisse dans son estomac. Toujours sans mot dire, il regardait Timber en attendant d’être saisi d’une douleur fulgurante.
Le copilote attendait un résultat.

Dans sa prédiction : une violente chiasse qui ferait rire les Mexicains en le regardant se vider par terre, le cul à l’air, empuantir l’air et scandaliser Chenoa.

Ou bien une overdose de Viagra pour lui filer la gaule du siècle. Les Mexicanos se foutraient de sa gueule pendant qu’il essaierait de chauffer Pénikett dans un moment pareil. Histoire de se soulager de la crampe infernale et se retrouver en tête d’affiche d’un site de cul.

Quelques longues minutes plus tard, il n’avait ni tapissé le sol ni inondé la tronche de Chenoa. Le pain était dégueulasse mais il ne contenait pas de surprise. Alors Scott arracha un autre morceau qu’il tendit à son amie.

«Il faut reprendre des forces.»

Il répéta l’opération avec l’eau.

« Ouais pour sûr. », fit-elle finalement avant de s’asseoir et de commencer à manger à contrecoeur.

Quoiqu’il en soit, la soirée passa, sans que personne ne vint les visiter. La nuit tomba, et avec elle, la fraîcheur du désert. Les murs, bien que solides comme ils avaient pu le voir, ne suffisaient pas à les isoler de l’extérieur, et aussi sûrement que le cri lointain d’un coyote pénétrait les parois, le froid en faisait tout autant. Chenoa se sentait faible. Le contrecoup des mandales qu’elle avait pris dans la poire. Sa jambe était raide, paralysée quelque peu par l’hématome qui l’avait faite changer de couleur. Elle redoutait les prochaines heures… Ce n’était pas une combattante, même si elle pouvait se défendre si sa vie en dépendait. Néanmoins, elle devait se rendre à l’évidence, elle n’était pas la plus qualifiée. Scott pouvait assurer, mais quelque chose lui disait que ce ne serait pas simple d’assurer pour deux.

Le copilote, de son côté, s’était ramassé dans un coin. Il avait eu envie de filer sa chemise à Timber pour lui assurer une couche de vêtement supplémentaire. Mais cette générosité ne lui ressemblait pas. Pénikett pourrait même lui rappeler qu’elle était militaire. Donc, dans son coin, il ressassait et se disait qu’il allait sortir Hicks des tréfonds.
Mec, femme, gamin, chien, il était prêt à buter tout ce qu’on lui opposerait tant que ça les faisait survivre. Pendant ce temps, il dessinait sur le sol avec le couteau émoussé qu’on leur avait laissé.

Le jour se leva, au chant d’un coq. Elle se rendit compte qu’elle avait un peu dormie, quand elle émergea subitement de ses pensées au bruit du gallinacée. Déjà fourbue en s’installant dans un coin de la pièce, dormir à même le sol, le dos contre le mur n’avait rien arrangé à sa condition physique. Elle était d’une humeur de chien.

« Hey les amoureux, c’est l’heure ! », fit une voix derrière le panneau en bois qui servait de porte. Chenoa pensa instinctivement que c’était le moment de faire un coup pour tenter de s’évader, mais le type doucha ses espoirs aussi subitement quand il ajouta :
« J’veux vous voir au milieu de la pièce, sinon je n’entre pas, et je lâche mes cleps… Comprendo ? »
Un aboiement féroce leur fit comprendre qu’il ne plaisantait pas. Quelque chose disait à Chenoa que les chiens en question ne seraient pas dociles et amicaux, loin de là.


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Ven 14 Mai - 10:52

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Timber & Cross
Du 04 au 25.02
2020
Bicycle Road Rage

Il n’y avait pas trop le choix, aussi Chenoa se leva avec difficulté, toujours aussi raide, pour se planter au milieu de la pièce.
« C’est bien, c’est bien. Et l’autre aussi. Quand j’ouvrirai vous avancerez en gardant vos mains en évidence. Au premier faux pas, on est toute une ribambelle à pouvoir vous cogner sur la gueule, vous ne vous en sortirez pas. Comprendo amigos ? », ajouta-t-il encore une fois.
« Ouais…. on a compris... », maugréa Chenoa d’une voix traînante.
Scott avait obéi. Son visage était fermé, résolu.
Dans la nuit, le gentil Greer avait balayé l’estrade et laissé la place gros pourri. Il s’avança et présenta ses mains en écoutant les chiens, conscient que ce n’était pas le moment d’agir.

La porte s’ouvrit, accompagné d’une raie de lumière vive qui agressa les yeux des deux prisonniers, confinés dans l’ombre depuis des heures maintenant. La chaleur était revenue avec le soleil. En faisant quelques pas en avant, le champ de vision autour de la porte était plus important, et comme promis, le type tenait des chiens en laisse, tandis que d’autres mexicains patientaient un peu plus loin. D’ailleurs, deux d’entres eux qui se trouvaient de part en part de l’huisserie les poussèrent dans le dos pour les faire avancer plus vite.
Ils furent dirigés vers une hacienda autour de laquelle de nombreux champ s’étiraient, essentiellement du maïs et des arbres fruitiers. Pour un peu Chenoa aurait pensé qu’ils avaient franchi la frontière mexicaine pendant la nuit, pour débarquer ici, mais c’était impossible. Ils n’avaient pas été enlevé depuis assez longtemps pour ça. Sur la terrasse, le chef qu’ils avaient vu la veille et qui leur avait donné le programme du jour, était installé à une table sur laquelle une nappe blanche en dentelle était disposée, et sur laquelle encore se trouvait croissants et autres agrément d’un petit déjeuner de luxe. En les voyant arriver, il se leva en écartant les bras et en s’exclamant :
« Mes amis ! Vous avez une mine affreuse ! » Il se tourna vers son acolyte : « N’est-ce pas qu’ils ont une mine affreuse ? »
« Ouais patron. Des vraies mierda. »
« Rien de tel que de la vitamine C pour bien commencer la journée ! ». Il versa dans deux verres du jus d’orange. « Du fait maison, mouah ! », fit-il en faisant un baiser sur ses doigts, démonstratif. Il posa les verres devant eux, et les deux loubards qui les accompagnaient leur appuya sur les épaules pour les forcer à s’asseoir.

Chenoa ne résista pas et posa ses fesses sur la chaise, muette comme une tombe. Elle ne se sentait pas de boire ce jus d’orange, même si cela venait de la même carafe que celui qu’il consommait actuellement. Enfin qu’importe, elle n’avait pas à faire honneur à son ravisseur. Une vieille femme sortie de la maison, suivie de plusieurs gamins, de sexe différents, âgés d’une dizaine d’année pas plus. Ils conservaient la tête baissée, et passèrent sans un regard vers Scott ou Chenoa.

« Ma collection, admirable n’est-ce pas ? », fit-il en suivant les gamins des yeux. « Ils vont travailler au champ. Je ne vais pas les entretenir gratuitement non plus. Je n’avais pas le coeur à les laisser dans la rue, maintenant qu’ils sont orphelins. ». Il opina du chef en s’allumant un cigare, se renversant dans sa chaise pour croiser les jambes et regarder les gamins partirent.

Ces quelques paroles mirent le feu au poudre du côté de l’amérindienne, qui attrapa son verre de jus d’orange avec lenteur, comme si elle osait finalement, et soudainement, elle bazarda la table sur le type avant de lui éclater le verre, qui ne cassa pas, sur la tronche, frappant à au moins trois reprises avant que les renforts n’arrivent pour la séparer de sa “victime”.

De son côté, Scott avait déjà pris une gorgée.
En découvrant qu’il était présenté au tordu de la bande, il avait sagement écouté son petit speech et s’était préparé à entrer en jeu. Le copilote voulait marchander, lui promettre de combattre tout ce qu’il lui opposerait et de lui faire du spectacle s’il rendait la Harley et la liberté à Timber. Débile quand on y pense d’un regard extérieur puisqu’ils ne permettraient jamais à un témoin d’aller chercher les flics. Mais il pourrait gagner du temps, offrir une chance à Pénikett de se barrer.

Sauf qu’au moment de jouer le barbouze et de formuler sa demande...c’est sa pilote qui le prit de vitesse.
PATATE DE FORAIN DANS TA GUEULE !!!!!
S’il n’avait pas eu la bouche pleine, Scott aurait éclaté de rire en admirant la scène. Mais les sbires étaient déjà là et ils commirent l’erreur d’attraper Chenoa en priorité. La crainte que le patron se fasse ouvrir la gueule par la furie sûrement...
En même temps, quelle idée de sous-estimer une emplumée… franchement.
L’indien c’est taquin. Quand on le chauffe, il rappelle qu’il a des prédispositions génétique en coiffure.

Scott relégua son plan aux oubliettes.
Il s’approcha mentalement de Hicks qui lui présentait ses poings enchainés, le lourd cadenas pendouillant mollement. D’un commun accord bien sadique, Scott tourna la clé et c’est Hicks qui prit le relais. Jöel Hicks le bagarreur, le violeur, la grosse ordure. Il sauta de sa chaise au moment où Timber se faisait interdire son quatrième coup par les loubards. D’un geste brusque, il en saisit un par l’épaule et lui cracha son jus d’orange dans les yeux, le faisant gueuler tant par la surprise que par la douleur.
Ce petit interlude lui permit de sortir le couteau qu’il avait planqué à l’arrière de son pantalon.

Pour des geôliers, c’est moyen de leur laisser la lame.
Peut-être avaient-ils vraiment un allié dans la place ?

Scott fît son taulard. Il surina par des coups rapide et successif son adversaire et le balança dans les jambes du deuxième qui tentait de lui apporter de l’aide.
«VAS-Y ! CRÈVE-LE !!!!» l’encouragea Scott en poignardant illico son nouvel opposant.
Le Mexicano lui répondit d’une sacrée droite, ce qui fit reculer le copilote et perdre l’accès à son couteau moisi. Peu importe, il arma aussitôt ses poings et s’engagea dans une échange intense. Le type d’en face savait répondre et il se reçut quelques directs bien senti avant de pouvoir percuter le manche d’un bon coup de genou. Il tomba à la renverse et Scott… ou plutôt Hicks… l’acheva à coup de bottes dans un mélange de cris bestiaux. Celui-là payait la note !
Il se plaça en première ligne face aux renforts, laissant l’occasion à Chenoa de pouvoir parler un peu plus jus d’orange avec son nouvel ami.

Dès que ça avait dégénéré, l’acolyte du chef s’était reculé. En fait, il avait donné l’ordre d’un coup de tête aux types qui venaient de rencontrer Scott en essayant de séparer Chenoa. Voyant que ça partait en couille totale, que la jeune femme était en train de mettre une tête au carré à son patron, surtout que depuis que les soudards l’avaient relâché suite à l’intervention de Scott, sa haine avait grimpé d’un cran et ses coups aussi, il tenta de rejoindre les chiens qui étaient attachés à la cabane où ils avaient passé la nuit.
Seulement voilà, voyant le pugilat qui s’instaurait dans l’hacienda, le plus grands des enfants, âgé de douze ans environ, sauta sur la vieille femme. Il n’en fallait pas plus pour que tous les autres ne la tabassent par terre à grand renfort de coup de pied distribué sur l’ensemble du corps de la malheureuse qui hurlait de douleur. Bientôt ses cris cessèrent et les mômes se dispersèrent pour se tirer de là.
Les chiens furent lâchés et ils filèrent aux trousses des enfants, au grand désarrois du maître chien qui aurait préféré que ça s’oriente vers la terrasse. C’est là que l’un des enfoirés eut l’idée de se servir de son arme à feu. Ben ouais, ça commençait quand même à puer l’histoire là, et il fallait y mettre un terme !
Le premier coup de feu claqua près de Scott, faisant sauter la plainte en bois qui encadrait la porte d’entrée derrière lui. Ce coup de semonce tira Chenoa de sa rage destructrice. Le verre qu’elle tenait dans son poing était maculé de sang. Le type avait la moitié droite du crâne enfoncé. Son oeil sortait de son orbite bien salement. Il ne bougeait plus, probablement inconscient, mais certainement pas mort. Il ne se réveillerait sûrement pas indemne si un jour il se réveillait.
D’autres coups de feu claquèrent alors. Le signal était donné pour flinguer les intrus !

« Vite dans la maison ! », fit Chenoa en attirant Scott avec elle dans l’entrée. Des éclats de bois et de plomb les suivirent à l’intérieur. Là, ils tombèrent face à face sur un type qui venait d’arriver en bas des escaliers, le flingue à la main, et qui cherchait l’origine du bordel. Ni une ni deux, Chenoa sauta dans les jambes du bonhomme en gueulant à Scott de récupérer son flingue.

Mais comme elle l’avait fait juste avant, Timber n’avait pas eu besoin de donner l’ordre que Scott s’était déjà exécuté. Le lien copilote à pilote avait été si bien pris à la légère par les bouseux du coin que ça leur éclatait à la gueule. La grande perche qu’était Timber avait foutu le type au sol et il tentait d’orienter son flingue sur elle. Greer lui écrabouilla la main d’un bon coup de botte, sentant bien ses petits osselets céder sous la pression. Il se pencha pour récupérer le pétard et il écrasa la crosse à plusieurs reprises sur sa sale trogne.

L’USAF était dans la place ! Il était temps de faire le ménage dans ce merdier !
Une fouille sommaire du bonhomme leur donna même un autre pistolet. Chacun armé, ils pouvaient maintenant faire des miracles.
Mais à peine équipé que deux gars venaient de débouler à l’entrée. C’était sûrement les types qui les arrosaient depuis tout à l’heure en gueulant tout une série de paroles en espagnol. L’équipe PéniGreer se retourna pour les arroser, comme à l'entraînement, deux balles par deux balles. Les deux zozos n’avaient pas pris la peine de se mettre à couvert, ayant pensé qu’ils poursuivaient des fugitifs terrifiés.
Erreur !

« On monte ! », gueula-t-elle alors que les tirs s'intensifiaient depuis l’extérieur. La palissade en bois ne suffisait pas à arrêter les balles qui claquaient autour d’eux, faisant éclater le mobilier, la vaisselle, et touchant même une bonne qui sortait en gueulant de la cuisine. De toute façon, Chenoa était déjà tellement à cran qu’elle lui aurait probablement tiré elle-même dessus si elle n’avait pas récolté un pruneau en passant.
L’idée de monter était de s’octroyer une position haute et défendable. Ce sera toujours ça de gagné face aux bandits. « Je garde l’escalier, tu fais le tour de l’étage pour voir s’il n’y a personne ? », proposa Chenoa à Scott, une fois arrivée en haut. La fusillade continuait en bas, signe que les malfrats tiraient pour le moment à l’aveuglette.
«Tu as du sang plein la gueule, Dark Timber !» répondit Scott en lui bourrant l’épaule. «J’adore ta nouvelle dégaine !»
« M’ouais, trop sexe…. », marmonna-t-elle, prenant conscience par là de la violence qu’elle avait exercé sur ce type, en bas. Elle n’en était pas super fière, mais pour le moment, c’était ça qui leur avait permis de se tirer d’affaire.


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